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02/02/2021

Différents "mondes"

J'ai suivi le film ce soir sur Pauline Dubuisson, et ensuite le reportage à son sujet, puis j'ai lu Wikipédia concernant cette tragédie. Ce qui m'a frappé est le contexte sociétal. Y apparaît à mes yeux le clivage entre les mondes bourgeois et le monde ouvrier. Dans le monde bourgeois, de nombreuses femmes ne veulent plus par exemple être les secrétaires médicales de leur docteur de mari, ni non plus être exclusivement femmes au foyer. Dans le monde ouvrier la femme se considérait alors émancipée dès lors qu'elle accédait à ce métier de secrétaire, que les autres ne voulaient justement plus exercer. L'émancipation des femmes était proportionnelle à leur milieu en quelque sorte.

Plus tard, un autre mouvement encore. Arrivèrent les rêves des beatniks, qui eux, désiraient un retour à la terre, femmes et hommes participant de la même expérience d'une reconnexion avec la nature. Le problème de l'égalité entre hommes et femmes allant alors de soi, en principe.

 

Pauline Dubuisson a fait partie de la mouvance de cette bourgeoisie nouvelle, dotée de nouveaux codes, d'ambitions inédites. Mais elle fut confrontée, en raison de son passé, aux jugements de conservateurs, et de ceux que ses relations avec les Allemands durant la guerre choquaient.

 

J'ai noté que c'est une couturière dans le jury qui sauva la tête de Pauline Dubuisson et non une intellectuelle de l'époque.

Le film de Clouzot se voulait à mon sens bienveillant envers Pauline Dubuisson, même s'il ne retranscrit pas la scène de crime selon les affirmations de Pauline, mais selon celles de son ennemi, l'avocat à charge, qui lui, accusait celle-ci d'avoir d'abord tiré dans le dos de sa victime. L'acteur incarnant cette victime est insultant jusqu'à l'odieux, humiliant la Pauline incarnée par Brigitte Bardot de façon tellement éhontée que le meurtre est montré comme une suite logique, la meurtrière agonie par les insultes de son ancien amant perdant le contrôle. Une façon de mettre en évidence les circonstances atténuantes profitant à la défense de Pauline Dubuisson.

 

Mais Pauline Dubuisson aurait selon le reportage perçu ce film comme étant malveillant à son égard, en raison notamment de l'ordre des coups de feu assénés à la victime, allant à l'encontre de sa version des faits. De plus, celle qui se voulait par l'éducation de son père être une femme de tête, se voyait réduite dans ce film à la simple condition banale de femme qui se fait éjecter en dépit du fait d'être belle.

 

Pauline Dubuisson désire être oubliée. Elle n'a pas voulu  de plaque mortuaire, ni de croix, pas de nom pour indiquer sa tombe dans un cimetière marocain, où elle a demandé d'être enterrée à même la terre. Une femme d'abord libre, éduquée pour l'être d'après les préceptes de son éducateur et père, et qui se retrouve hélas sans défense face au chagrin que lui cause la perte de son amant, éperdue, prisonnière d'une passion amoureuse.

 

Lors de ses neuf années en prison Pauline Dubuisson avait trouvé une sorte d'équilibre, de raison d'être, grâce à celles qu'elle appelait ses sœurs, les autres prisonnières. Le cauchemar à repris peu à peu à sa sortie de prison, quand de nouveau elle a éveillé la curiosité et suscité malgré elle, à son désespoir, le rejet, car dès lors qu'elle était reconnue, le regard sur sa personne changeait. Se soustraire à ce regard, au jugement, aura motivé son désir d'en finir. Qui sommes-nous pourtant pour juger ?

01:36 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)

31/01/2021

Attention !

Commentaire sur L'Ensorcelée de Barbey d'Aurevilly. Dernier round pour moi sur la Lande. Neuf coups de cloche d'airain résonnent jusque dans la Lande où se trouvent toujours le pauvre cheval éclopé, qui a probablement été blessé par une personne malveillante comme l'avait d'abord supposé Barbey, mais le berger qui n'a pas été embauché n'est pas forcément l'auteur de cette malveillance, et cela Barbey ne l'évoque pas, lande où se trouvent toujours également le fermier et le propriétaire foncier, qui ont fraternisé par le biais de leur empathie pour la chouannerie. Le fermier a peur car la dernière fois qu'il a entendu sonner à minuit ces neuf coups sourds et puissants de cloche, son bébé est mort dans des convulsions.

Peu à peu Barbey avoue qu'il se rallie à la thèse de la sorcellerie. Moi lectrice j'ai en tête l'erreur judiciaire, le coupable idéal, le berger qui peut à tout moment cramer et n'en mène pas large pour lui, même si je ne suis pas si grande, ni si blonde, mais avec quand même du gris dans les yeux.

 

Barbey m'intimiderait-il avec ses croyances ? Car elles sont peut-être encore de rigueur aujourd'hui, mises en pratique de façon moins voyante par des adeptes de la chouannerie. Victor Hugo a commis des erreurs dans sa vie comme tout le monde mais était tellement plus ouvert à toutes les éventualités qu'il aurait fait un bien meilleur flic que Barbey.

 

La plume de d'Aurevilly est puissante, très poétique... il n'en est que plus dangereux pour le "berger errant" d'aujourd'hui. Attention lecteurs et lectrices, Barbey est de la dynamite. Il faut être un démineur chevronné pour le lire.

09:35 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)

30/01/2021

Retour dans la lande

Je poursuis mon chemin dans la lande, toujours plongée dans le roman de Barbey, intitulé L'ensorcelé, quand soudain La Blanche, cheval du fermier qui accompagne Barbey ploie sous la douleur d'une blessure invisible. Certes le sabot de la Blanche est déferré, mais aucune blessure à constater à la lueur de la lanterne à l'heure où le brouillard s'intensifie sur la lande et que le froid pique. L'esprit romanesque de tout adolescent qui se respecte est alors en éveil, d'autant plus que Barbey nous parle de la chouannerie qui n'était pas une ânerie pour Barbey, n'en déplaise à Victor Hugo qui préférait Napoléon.

 

Où l'on s'aperçoit que Barbey revendique un esprit de caste. Aujourd'hui nous avons les corporatismes, ce qui n'est pas beaucoup mieux.

 

Où l'on voit aussi que Barbey est très attaché à la terre comme le Wang Lung de Terre de Chine et de ce fait tout ce qui est étranger au terroir, voire vagabond est suspect. Barbey est donc en somme et à son corps défendant l'incarnation à mes yeux du paysan universel, avec ses charmes et ses maléfices. Maléfices dans le sens où le paysan lorsqu'une tuile lui tombe sur la tête pense qu'il est, dans cette région-ci, sous le coup du sort d'un berger errant. Barbey attribue l'origine des bergers errants aux Vikings : ils sont grands, avec des yeux gris, blonds... et méchants. Pour une fois que ce ne sont pas les Gitans qui trinquent, on ne va pas se plaindre. Le fermier se confie à son compagnon, (du même village que lui pratiquement), bien que l'un soit un notable, sans accent, et que l'autre parle le patois par moments, avec l'accent du coin. À noter que les barrières sociales tombent d'un coup car un honorable fermier fils de chouans et un autre chouan quoique propriétaire foncier ne peuvent pas se haïr, ne peuvent au contraire que  fraterniser.

 

L'ado qui sommeille en chacun de nous est charmé, mais bon, en en conclut malgré tout que le vagabond risque à tout moment de griller comme une saucisse sur un bûcher s'il est vu comme un jeteur de sort. On se réveille, du coup. Mais on a "l'effet "Wang Lung" en tant que lecteur : malgré leurs failles, ils sont attachants ces paysans. Du moins jusqu'ici. Je reprends mon voyage dans la Lande ce soir, après Colombo, "vagabond" à sa manière qui aurait dû ruser je pense en Normandie pour ne pas recevoir les foudres de fermiers,  suspicieux en diable dès lors que l'on évoque par sa tenue vestimentaire un bourlingueur.

 

 

18:24 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)