22/01/2008
Dysfonctionnement de l'UE
TRAITE ET DYSFONCTIONNEMENTS DE L’UE
La Féodalité
dimanche 20 janvier 2008, par Pierre Bellanger
Suite
« Deux siècles plus tard, la société est totalement chamboulée. Si dans l’ancien régime le pouvoir économique, c’était la possession de la terre, aujourd’hui le pouvoir économique c’est la possession du capital financier. Malheureusement, dans les replis du traité de Maastricht, se cachait cette stipulation : « Toute restriction aux mouvements de capitaux et aux paiements, à la fois entre les Etats membres et entre les états membres et les tiers, est interdite (art. 56, ex art. 73B et suivants) ». Pouvait-on trouver une phrase plus explicite pour donner la Primauté à la Finance. Nous avons inversé l’ordre ; les intérêts particuliers des financiers priment l’intérêt général. Ce serait relativement sans gravité, si l’oligarchie financière était composée d’hommes parfaits. Hélas cette oligarchie a remplacé l’aristocratie en lui empruntant les mêmes tares, un égoïsme insolent, qui est pire que le bon vouloir du Roi ; lui, au moins, avait un visage ! »
Le lien
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Philosophie politique
Cette réflexion en conclusion de l’article « les limites de la compassion » par Myriam Revault D’Allonnes :
« Le zèle compassionnel qui est censé assurer aux gouvernants une légitimité démocratique renouvelée – « je souffre avec vous » – peut conduire à noyer la politique dans le partage des émotions. Cette dérive procède d’un mouvement de fond qui a vu la souffrance s’installer au cœur de la perception du social et du politique. L’actuel tournant compassionnel accompagne la précarisation croissante des existences et des parcours professionnels. La compassion est aussi, ce qui peut sembler paradoxal, l’envers de la défection des anciennes solidarités. On l’aura compris : si la politique n’est pas soluble dans la compassion, celle-ci ne fait pas davantage une politique… »
Dans Philosophie magazine n°16 (p.20)
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Extrait
Un extrait de L’Affaire du boucher du Vieux-Lille de Christophe Debien. Édit. Ravet-Anceau. Polar en nord :
"Devant la porte battante de la salle des nécrops, une femme endeuillée de velours noir, la mère probablement, ne cessait d’arpenter le couloir dans sa largeur.
Je ralentis le pas, et observai son étrange manège.
Elle s’asseyait sur l’un des bancs lacérés de graffiti, se figeait un instant puis se relevait pour se rasseoir de l’autre côté. À chaque nouveau cycle, elle s’arrêtait quelques secondes pour griffer la peinture écaillée de la porte avec ses ongles vernis.
Il semblait bien que le cadavre n° 1-01-06-04 avait trouvé preneur.
En m’approchant, je songeais à la terrible épreuve à laquelle venait d’être confrontée cette femme : l’angoisse devant l’absence prolongée de sa fille, le meurtre étalé dans les journaux, le coup de fil de la police, puis…l’Horreur.
Cette femme avait dû être obligée de contempler le corps désarticulé de sa fille car, devant l’ampleur des mutilations, je doutais qu’Aziz ait pu faire des miracles. Et pourtant, je connaissais le talent unique avec lequel La Gargouille rendait l’apparence de la vie aux cadavres avant de les présenter aux familles.
Avec un respect ancestral, coutumier, il nettoyait soigneusement toute trace de sang ou de fluide sur l’épiderme. Puis il enduisait le corps d’un mystérieux onguent (Aziz avait toujours refusé de livrer sa formule) subtilement parfumé d’ambre et de cèdre, qui semblait littéralement ressusciter la peau. Ensuite, il restait un long moment à regarder la dépouille comme pour s’en imprégner. « Je photographie son âme, disait-il, pour qu’elle s’accorde avec les vêtements que je vais choisir. »
Et il allait s’enfermer dans le minuscule local où il avait entassé une vertigineuse réserve d’effets en tout genre. Il revenait quelques instants plus tard et habillait, lentement, précautionneusement, la victime.
Soudain, on comprenait la magie d’Aziz : d’un amas de chairs mortes, il avait pétri un être endormi, dont on pouvait lire la personnalité, les défauts, les faiblesses comme s’il s’agissait d’un parent ou d’un ami.
Enfin, Aziz enduisait les parties découvertes de la base huileuse destinée à fixer le maquillage : il camouflait les cicatrices, les hématomes, rallumant le regard, ornementant les mains, insufflant la vie. Aziz, j’en étais persuadé dans ces moments-là, devait être égyptien. Car, dans ses veines, coulait le sang d’un grand prêtre préparant Pharaon à affronter le regard d’Horus.
J’étais parvenu à présent devant la double porte, m’interposant par nécessité sur la trajectoire de la femme en noir. Elle me fixa un instant, tout en continuant à graver le bois de ses ongles. Aucune larme ne creusait son visage, aucune larme n’y avait sa place. Car chaque trait, chaque interstice n’était qu’un hurlement muet d’une intensité atroce.
Je ne pus supporter cette vision et m’apprêtais à pousser le battant lorsque mes yeux s’arrêtèrent sur le mouvement de ses mains : elle traçait, du bout de ses doigts, de petits signes réguliers, comme une écriture minuscule imprimée sur le mur.
Soudain, je fus pris d’une violente nausée, lorsque je réalisai qu’il s’agissait de la reproduction maladroite des scarifications tracées dans la chair de sa fille !
La lumière elle-même semblait s’être figée, sculptant les vivants à l’image de la morte, refusant de ricocher, comme à l’accoutumée, sur l’inox des bacs de dissection. Au centre de la pièce, sur l’autel improvisé d’une table recouverte d’étoffes, une jeune fille semblait attendre le baiser d’un prince charmant pour se réveiller. Devant, trois statues humaines fixaient le visage paisible de l’adolescente : Vanacleef et Aziz, encadrant un homme au regard absent.
Je réalisai alors combien j’avais sous-estimé le talent de La Gargouille ! Aucune trace, aucune cicatrice sous la lueur crue du réflecteur chirurgical. Les mutilations de la face avaient été corrigées par des modelages de cire habilement colorés, les yeux remplacés par des répliques de verre, les béances auriculaires dissimulées par les mouvements d’une coiffure soigneusement ordonnée. La jeune fille portait un ensemble pourpre qui semblait lui avoir toujours appartenu. Les membres avaient été judicieusement disposés afin que l’on ne remarque pas les segments manquants. Oh oui, j’avais sous-estimé Aziz et à présent, j’avais l’impression que c’étaient les morts qui étaient debout !
Un détail capta mon attention tandis que j’arrivai tout près du corps : à la naissance de la poitrine, dans le discret décolleté, quelques scarifications apparaissaient légèrement en relief malgré le maquillage. Un détail que seul l’œil d’un praticien exercé, ou celui d’une mère, pouvait déceler."
Christophe Debien
15:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (2)