06/01/2009
Les amants de Bagdad
"A travers Un monde qui s’efface, texte de Naomi Wallace, les horreurs d’un combat armé côtoient la poésie arabe contemporaine. Puis on entend la douce mélodie de deux êtres qui tentent de s’inventer un possible dans un présent trempé de blessures, ce sont Les amants de Bagdad, de Jean Reinert."
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05/01/2009
À propos de Barthes
« ... Il y a un écrivain qui n’a pas l’air d’avoir été engagé et dont vous découvrez qu’il l’a été au suprême degré, en fait beaucoup plus que Sartre, c’est Mauriac ! Prenez le livre de son journal et de ses mémoires politiques, sans parler des bloc-notes, vous êtes absolument étonnés, et en plus ça se lit formidablement, parce que c’est plein de talent. Donc, l’effet engagé, Barthes l’avait très bien senti : il avait horreur de ce qui poisse, ce qui glue, ce qui retarde, ce qui pèse, tout ce qui bavarde au lieu de dire quelque chose. Dire vraiment, c’est cela être engagé. La littérature engagée est une très mauvaise littérature, dont Barthes a fait la critique. On est aussi antifasciste que l’on est antistalinien, spontanément, si l’on peut dire. C’est une question, encore une fois, de sensibilité, de corps et de goût.
On pourrait reprendre à propos de Barthes cette belle formule de Voltaire, contre toutes les vulgarités, d’hier et d’aujourd’hui : « Pourquoi a-t-il toujours raison ? C’est parce qu’il a du goût. »
Oui, « anarchiste conservateur », ce mot d’Orwell convient à Barthes. Orwell aura été en britannique, ce que Barthes aura été en français, mais, notez-le bien, dans ce français du Sud-ouest, où l’on retrouve ces esprits éminents, Mauriac, Montaigne, La Boétie, Montesquieu, Roland Barthes. »
Philippe Sollers
http://www.magazine-litteraire.com:80/content/Breves/arti...
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Suite
N'ayant moi-même pas eu le temps de lire intégralement l'article au sujet de Maupassant, proposé hier, j'y reviens aujourdhui : il mérite en effet toute notre attention. En voici un nouvel extrait, à relire peut-être pour vous, mais ne découvre-t-on pas toujours de nouvelles choses sur un chemin que l'on croyait routinier. À vous de voir :
"À la recherche d’une comédie (in)humaine
Si, annulant le classement chronologique, on reprend l’ensemble des contes sélectionnés pour les observer comme un seul grand texte, de nouvelles images surgissent qui trament, en filigrane, un curieux univers avec ses décors et ses acteurs mus par d’insolites mais cohérents mobiles.
Le décor de la violence
D’un récit à l’autre, Guy de Maupassant rappelle que les drames paysans ont leur géographie, leurs heures et leurs saisons.
Presque tous les désordres se produisent hors de la commune : dans une habitation située à l’orée du bois ou à une lieue du hameau, au bord d’une rivière ou d’un chemin, dans les champs que traversent bergers et gardiennes de troupeaux. Tous ceux qui s’éloignent de leur demeure basculent rapidement dans la délinquance : à peine arrivées au Havre ou à Barentin des paysannes sans ressource doivent céder à deux gendarmes (L’Odyssée d’une fille) ou à un notable (Le Port), premiers pas vers la prostitution. La Petite Roque, qui s’est aventurée dans la futaie, se fait violer, à l’instar de la servante « seule au bord d’un chemin creux » (Le Vagabond). Le danger ne guette pas uniquement les femmes. En rase campagne, un innocent berger est fusillé par des francs-tireurs (Les Rois) et, sur la falaise, un couple est massacré par un prêtre fanatique (Le Saut du berger). Conscients de la menace que représente l’éloignement, les gueux mettent « des frontières à leur mendicité », n’excèdent pas les limites d’invisibles cercles protecteurs, faute de quoi ils périssent (L’Aveugle, Le Gueux).
Si les agressions sexuelles sont commises en plein jour, les autres voies de fait, en revanche, s’accomplissent au crépuscule, entre chien et loup, ou juste après minuit, à l’instant où le buveur sort du cabaret et se trouve saisi par « un froid mortel […] jetant une ivresse nouvelle par-dessus l’ancienne »
Le déchaînement des passions nécessite aussi des conditions climatiques particulières : les attentats à la pudeur interviennent systématiquement aux beaux jours, dans « l’air lourd et brûlant de la plaine », sous « une ardente lumière », dans « des odeurs de basse-cour, des tiédeurs fermentées d’étable »
Tous les autres crimes sont perpétrés en hiver, sur deux scènes opposées : à l’intérieur des terres, on tue ou l’on se donne la mort quand « la campagne (est) froide et mortelle », « endormie sous un grand drap de glace » , « une ouate de cristal » ; au contraire, sur le littoral, les carnages se produisent quand l’océan est déchaîné, que le vent siffle sur la côte au point de faire « gémir les grands arbres » et d’« emplir de bruit (les) oreilles et (le) cœur exalté de tumulte ». Ces éléments, tourmentés et anthropomorphisés, sont même les véritables responsables du drame.
http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=SR_017_0397
Un mari trompé et Ivrogne, est retenu au café jusqu’à minuit précis par le frère de l’amant. Il regagne son logis en titubant. Mais « une bourrasque, s’engouffrant dans la rue étroite, le lance en avant, le fait courir quelques pas… » [24]. Il arrive quelques instants trop tôt, au moment où son rival sort. Il tue, à coups de chaise, sa femme infidèle.
Ces paysages, excessivement agités ou trop engourdis, sont toujours en noir et blanc : le « tapis de neige livide et dur » comme l’écume des vagues « énormes et baveuses » contrastent avec le ciel nuageux dans lequel des nuées de corbeaux « s’abattent comme une pluie noire ». Et ce décor, anamorphosé, prend bientôt les couleurs du fantastique, avec quelques touches de sang ou les lueurs écarlates d’un incendie volontaire."
Myriam Tsikounas
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