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15/07/2014

Jean Redon

"Jean Redon est un écrivain français, scénariste et dialoguiste, essentiellement connu pour son unique roman Les Yeux sans visage, paru en 1959 dans la collection "Angoisse" des Editions du Fleuve noir. Ce roman a été adapté au cinéma par Georges Franju en 1960."

Wikipédia

 

Nous avons regardé Les Yeux sans visage hier soir sur Internet. De jeunes étudiantes sont capturées par la fidèle infirmière d'un chirurgien qui a une fille défigurée par l'accident de voiture dont il est responsable. Pour lui redonner visage humain, il vole aux captives la peau de leur visage qu'il entend greffer sur la face ravagée de cette dernière. Echec après échec la fille du chirurgien prend soudainement conscience de la monstruosité de l'acte paternel, de la sienne propre puisqu'elle est consentante et reprend visage humain, mais de façon spirituelle, en libérant la dernière proie des prédateurs ; ce faisant, elle se libère elle-même de ceux-ci.

 Cela parle d'exploitation de l'homme par l'homme, de prédation par la domination mortifère d'hommes sur d'autres hommes... une sorte de portrait de ce que peut être une société uniquement axée sur le profit et où les dominants finissent par y perdre la tête tout en croyant l'avoir bien sur les épaules et être bénis des Dieux.   

07:50 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)

13/07/2014

Le livre

J'ai terminé la lecture d'Au-dessous du Volcan. Qui en demande plusieurs. Que me semble ? L'alcool n'est pas un dérivatif comme peut l'être la lecture qui permet aussi une échappée nécessaire pour affronter les choses ensuite en connaissance de cause plus approfondie, si  l'on peut dire ;  l'alcool chez le Consul serait un baiser  à la mort, une pulsion, une manifestation de la mort elle-même qui taraude la conscience du buveur dont la vie ne lui fiche pas la paix en raison sûrement de son traumatisme de guerre. Il aurait voulu des enfants mais l'amour d'Yvonne finalement, au fur et à mesure que l'alcool l'invalide, il voudrait le recevoir en tant qu'amour d'une fille envers son père, ou d'une sœur  pour son frère, un amour asexué afin de ne pas remettre  la vie en perspective alors que la lassitude le gagne et qu'il  cherche la paix avant tout. Mais le retour d'Yvonne en évacuant sa nostalgie d'elle le ramène à une réalité faite de jalousie, de rivalité avec le petit frère qui, en voulant symboliquement tuer le père à travers le grand frère, fragilise ce dernier, l'exposant de plus à une insupportable solitude. L'indien laissé seul agonisant au bord de la route ce sera lui également, son companero, son frère spirituel, après avoir traversé la même solitude en une agonie similaire.  

08:27 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)

10/07/2014

suite de l'extrait du post précédent - pollution par le bruit déjà

Et, ayant cheminé un bon bout parmi ces châtaigniers et arbres ombrageux, ils donnèrent en un petit pré qui était au pied de certains hauts rochers, desquels tombait un très grand torrent d'eau. Au pied de ces rochers il y avait certaines maisons mal bâties, plutôt ruines que maisons, et d'entre icelles ils reconnurent que le bruit de ce battement sortait, lequel ne cessait point encore. Rossinante s'effaroucha à ce grand bruit que faisait l'eau en tombant et à ces grands coups. Mais, don Quichotte, l'apaisant et le flattant, s'approcha peu à peu des maisons, se recommandant de tout son cœur à sa maîtresse, la suppliant qu'en cette horrible et épouvantable journée et entreprise elle le voulût favoriser ; et, tout en allant, il se recommandait aussi à Dieu, afin qu'il ne l'oubliât point. Sancho ne le quittait point d'un pouce, mais étendait le cou et la vue tant qu'il pouvait par entre les jambes de Rossinante pour aviser s'il ne verrait point ce qui le tenait ainsi en suspens et en crainte. Quand ils eurent cheminé encore environ cent pas, ayant tourné un rocher, leur apparut à découvert et toute patente la cause même, sans qu'il y en pût avoir d'autre, de l'horrible et épouvantable bruit qui les avait tenus toute la nuit ainsi en suspens et effrayés. C'étaient ( s'il ne t'en déplaît, ô lecteur ) six maillets d'une foulerie à draps qui formaient ce bruit par leurs coups alternatifs.

 

Quand don Quichotte vit ce que c'était, il devint muet et se sentit défaillir du haut en bas. Sancho le regarda et vit qu'il avait la tête penchée sur sa poitrine avec apparence d'être tout honteux. Don Quichotte se mit aussi à regarder Sancho, et vit qu'il avait les joues enflées et en apparence tout près d'éclater de rire, et sa mélancolie n'eut pas tant de pouvoir sur lui que, voyant Sancho de telle sorte, il se pût tenir lui-même de rire ; et, comme Sancho vit que son maître avait commencé, il lâcha la bonde de telle façon qu'il fut contraint de se serrer les flans avec ses deux poings pour ne pas crever. Il se calma par quatre fois, et autant de fois recommença sa risée, avec la même impétuosité qu'à la première, de quoi don Quichotte se donnait au diable ; et encore plus quand il lui ouït dire comme par manière de moquerie ces paroles : "Il faut que tu saches, ami Sancho, que je suis né par le vouloir du ciel en cestui notre âge de fer pour y faire revivre l'âge doré ou d'or. Je suis celui pour qui sont réservés les périls, les grands exploits et les faits valeureux." Et ainsi continua à rapporter et à lui répéter tous ou la plupart des discours que don Quichotte lui avait dits la première fois qu'ils avaient ouï ces épouvantables coups... Or, voyant don Quichotte que Sancho se moquait de lui, il se courrouça et fâcha de telle sorte qu'il leva sa lance en haut et lui en déchargea deux tels coups que, si, au lieu de tomber sur ses épaules, ils eussent porté sur sa tête, don Quichotte eût été quitte de payer son salaire, si d'aventure ce n'eût été à ses héritiers. Sancho, voyant que ces moqueries obtenaient si mauvais succès, craignant que son maître ne passât plus outre, lui dit d'une grande humilité : " Apaisez-vous, monsieur, car par Dieu je plaisante. — Et si vous plaisantez, je ne plaisante pas, moi, répondit don Quichotte. Venez çà, monsieur le plaisant. Vous semble-t-il que, si, tout ainsi comme c'étaient des maillets de foulerie, c'eût été une autre périlleuse aventure, je n'eusse pas montré le courage qu'il convenait pour l'entreprendre et la mettre à fin ? Suis-je obligé par hasard, étant chevalier comme je suis, à connaître et distinguer les sons, et savoir ceux qui sont de maillets de foulerie ou non ? Outre plus qu'il pourrait être, comme c'est la vérité, que de ma vie je n'en aie vu aucun comme vous qui avez été nourri et né entre iceux, méchant vilain que vous êtes. Ou bien faites que ces six maillets se changent en six géants, et me les envoyez un  à un à la barbe, ou tous ensemble, et, si je ne vous les flanque les pattes en l'air, moquez-vous de moi tant que vous voudrez. — Eh bien, monsieur, c'est assez, répliqua Sancho, car je confesse d'avoir un peu trop gaussé ; mais dites-moi, à cette heure que nous sommes en paix ( ainsi Dieu vous tire de toutes les aventures qui vous arriveront, aussi sain et sauf que de celle-ci ! ), cela n'a-t-il pas été une chose pour rire et aussi une chose bonne à raconter, que la grande peur que nous avons eue ? Au moins moi, car, pour votre regard, je sais bien que vous ne connaissez ni ne savez ce que c'est que crainte ni effroi . — Je ne dis pas, répondit don Quichotte, que ce qui nous est arrivé ne soit chose digne de risée, mais non pas chose à raconter, car toutes personnes n'ont pas assez d'esprit pour savoir mettre les choses en leur point. — Au moins, répondit Sancho, avez-vous su mettre en son point votre lance, en me l'appointant sur la tête et m'en donnant sur les épaules, et rends grâces à Dieu et à la diligence que j'ai mise à esquiver le coup ; mais passons, tout s'en ira à la lessive ; car j'ai ouï dire : celui-là te veut du bien qui te fait pleurer ; et davantage que les grands seigneurs ont de coutume, après une mauvaise parole qu'ils disent à un valet, lui donner tout aussitôt une paire de chausses ; toutefois je ne sais ce qu'ils lui donnent après lui avoir donné des coups de bâton, si ce n'est que les chevaliers errants, après les coups de bâton, donnent des îles ou royaumes en terre ferme.

[...]"

Don Quichotte - Cervantès       

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