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19/05/2012

Suite de Que se passe-t-il à La corne d'abondance ?

— Vous savez que Peter sent les infra-sons, mais pas à la manière des loups. Les infra-sons produisent sur lui quelque chose d’étonnant, une capacité à se concentrer qui le ramène à un certain niveau de normalité du point de vue neuronal. Si bien que nos nouveaux amis les ex-gueux ont entrepris de faire un herbier avec lui, sous les conseils de Janon. Une vraie petite elfe que cette Janon, et son père de savant n’évoque-t-il pas un super hobbit ?

— Vous avez raison Monsieur Dross, on se croirait en forêt de Brocéliande avec eux, ils mettent une super ambiance. Merci à vous pour Peter.

— Mais c’est tout naturel, chère madame.

Dora, prise au dépourvu par l’angoisse, dans ce moment de relative détente générale posa les coudes sur la table, le poing gauche serré dans la main droite, elle y appuya son front une seconde puis sa bouche dans un mouvement d‘énervement qui surprit l‘entourage. Exhalant l’inquiétude, elle jeta un regard circulaire et soupira par les narines à la manière d‘un jeune taureau. 

— ça ne va pas ?

Demanda Hector, un des informaticiens de la bande. Dora soupira encore et encore et éclata «  Je vous trouve trop patients, trop gentils. Une gentillesse qui me fait mal. Évidemment je ne parle pas de Peter, ne me regardez pas comme cela ! Je parle de Jeudi. Vous avez pensé à ce qui pourrait lui arriver ? À ce qui lui est déjà arrivé ?

Sa bouche se tordit en un rictus que Dora tenta de dissimuler du mieux qu’elle put derrière le poing que formait ses mains jointes. 

— Personnellement reprit-elle, j’ai envie de bouffer du Le Noble, de bouffer du Piéaumur. Il n’y a plus rien à espérer de gens comme ça, je suis inquiète pour Jeudi.

— Jeudi est entouré d’une centaine de gueux avec chiens loups prêts à bondir sur ceux qui auraient la mauvaise idée de l’alpaguer, nous ne l’avons pas envoyé au casse pipe ton Jeudi, fais nous confiance. De toute façon, si l’un de nous s’était pointé là, ça aurait été l’hystérie à coup sûr. On ne peut pas passer des dédicaces au coup de pied au cul, comme ça. ç’aurait été vécu comme une marche arrière incompréhensible par eux. Ce sont de grands gosses au fond.

Dora n’en finissait pas d’écumer, et reprit du tac au tac :

— Ce sont des salauds et nous avec qui n’avons pas vu venir le coup. Pourquoi on s’est laissé appeler Glorieux par exemple. La honte ! 

— Ce n’est pas le moment de se disputer Dora. Odette qui reprenait espoir…tu vas tout gâcher… 

Mais Dora continua :

— Ce sont des paumés. On aurait dû jouer cartes sur table dès le début. Mais on n’a pas su. Et pourquoi ? parce que ces cirages de pompes nous plaisaient au fond. Au fond, nous étions un peu comme eux, nous aimons qu’on nous flatte l’ego et nous en sommes réduits aujourd’hui à compter sur Jeudi et les gueux pour les remettre en phase. À compter sur les victimes de ces imbéciles, de ces bourreaux. Ce sont eux qui ont besoin de notre aide et pas nous de la leur que je sache.

— Qui ça eux ? Tu parles de qui au juste ? Tu délires un peu ce matin Dora, tu m’as l’air de perdre un peu pied, non ? 

 

Déclara Tom

— Je parle des Bléassenghins. Ce sont de dangereux paumés, Tom. Il faut aider Jeudi.  

18/05/2012

Que se passe-t-il à La corne d'abondance, suite des Marcheurs

Une vingtaine de personnes résidaient à La Corne d’abondance, notamment quelques ingénieurs aéronautiques, qui supervisaient à l’occasion la fabrication de nouvelles fusées ou aéronefs de plaisance, des informaticiens — eux travaillaient essentiellement à la maintenance des robots en charge du montage des différents engins — quelques rescapés des expéditions punitives — notamment des gueux ayant perdu leur animal de compagnie — et divers savants. Parmi la population des professionnels on trouvait souvent des couples de partenaires exerçant la même discipline. La géologue dont le coup de foudre pour Jeudi avait marqué les esprits faisait exception. Ce petit monde s’entendait bien ; les gueux, bien que très secoués par des traumatismes plus ou moins récents, acceptaient de se laisser apprivoiser et aimaient à s’occuper de travaux de jardinage quand ils ne partaient pas en excursion avec Janin, trop heureux de partager avec eux son savoir de botaniste émérite. Ce matin-là tout le monde se levait sans empressement, hormis les anciens vagabonds, mus par leur curiosité pour les nouvelles plantations. Les autres avaient suspendu les travaux de recherche et annulé les vols depuis quelques jours, en raison des menaces de Le Noble depuis qu’il leur avait dévoilé ses intentions de prendre la zone verte. Il voulait sans nul doute les décrédibiliser à son profit et à celui des siens, auprès de l’État. Bien sûr cela faisait cinq années que le groupe de scientifiques en place était entré en dissidence discrète contre la population des Bléassenghins. Mais ces intellectuels ne leur voulaient pas de mal, au contraire, et espéraient de leur part un changement d’attitude envers les gueux et les malades. Les institutions s'étaient dévoyées, au gré de la déliquescence sociale du pays dont le gouvernement, à force de déléguer, avait fini par se désintéresser du sort des démunis. À ce rythme avait eu lieu la transformation des hôpitaux publics en différents lieux d’accueil dont la mission n’était plus, à priori, de soigner les malades, malgré quelques derniers faux-semblants pour certains établissements. Les Bléassenghins vivaient sur le trésor de guerre que constituait la vente de tableaux de génie et autres productions, telles celles du septième art et amalgamaient les privilèges concernant leurs cliniques privées et autres avantages de leur infinie richesse, et les voyages en fusée supervisés par un astrophysicien de grand renom résidant la plupart du temps à la zone verte. Tout cela faisait partie de l’ordre naturel des choses, le confort à outrance n’aidant pas, ils tenaient à leur mode de vie comme à la prunelle de leurs yeux, si bien que les personnes ne correspondant pas à leur monde, tout en reflets de miroirs de leur propre perfection, devenaient politiquement suspectes. Ils finissaient eux-mêmes leur jour en des lieux quasi secrets, certes luxueux mais cachés, poliment exclus de leur propre famille. Il avait fallu pour réveiller les scientifiques de la torpeur dans lequel ce train de vie avait fini par les plonger eux-mêmes, cette prise directe avec la réalité des exécutions punitives de vagabonds en rupture de banc. Quelque chose avait définitivement déraillé dans la tête de cette population, elle avait glissé peu à peu dans le fascisme. La feinte des loups ne suffisait plus, les scientifiques de la zone verte savaient maintenant que Le Noble avait découvert le secret de l’hôpital qui se construisait peu à peu et en toute discrétion au cœur de la forêt, à l’aide de leur réseau. Le Noble était au courant et les traînerait devant un tribunal pour s’être accaparé de terres appartenant à la région si les habitants ne leur accordaient pas une solution à l'amiable. En ce 26é siècle le fascisme était revenu sans se déclarer ouvertement, sournoisement, mais plus virulent que jamais, comme inhérent à la nature humaine, et les Bléassenghins, trahis dans leurs convictions profondes ne leur pardonneraient peut-être pas d’avoir, non seulement tu leurs dissentiments mais agi, qui plus est, derrière leur dos, comme de mauvais farceurs. C’est pourquoi l’on était plutôt inquiet quant à la réponse des Bléassenghins parmi les résidants de La corne d’abondance en ce petit matin de mai, et, pour se distraire un peu, on essayait de fixer son attention sur Odette en attendant les mauvaises nouvelles que ne manqueraient pas d’apporter Jeudi.

— Dites-nous votre rêve Odette

demanda Dora mi-rieuse, mi sérieuse. Odette prit à la lettre cette requête et raconta :

— J’ai dû avoir une petite faim en dormant. J’ai rêvé d’un oiseau que j’avais trouvé mort et mis au congélateur pour éventuellement le manger au prochain repas. C’est drôle, je ne suis pas vraiment carnivore en fait. Bref, je ne tarde pas à sentir une petite faim, je vais donc chercher l’oiseau pour le passer à la poêle… il n’était pas encore plumé, ni rien. Je le pose, il profite que je lui tourne le dos pour se mettre debout. Dans les rêves on a des yeux derrière la tête. Il est rigide comme un animal empaillé, du coup je le crois malgré tout toujours mort, je m’approche de lui et, ô stupeur, il cligne des yeux. Mon cœur fait un bond, j’oublie ma faim, pas question une seconde de le tuer. Après la peur occasionnée par cette résurrection, je suis heureuse de le voir en vie.

Silence dans la salle puis un médecin de la compagnie prend la parole :

— Vous savez que Peter sent les infra-sons, mais pas à la manière des loups. Les infra-sons produisent sur lui quelque chose d’étonnant, une capacité à se concentrer qui le ramène à un certain niveau de normalité du point de vue du travail des neurones. Si bien que nos nouveaux amis les ex-gueux l'emmènent souvent avec eux. Ils ont entrepris de faire un herbier ensemble, sous les conseils de Janon. Une vraie petite elfe que cette Janon, et son père de savant n’évoque-t-il pas un super hobbit ?

— Vous avez raison Monsieur Dross, on se croirait en forêt de Brocéliande en leur présence, ils mettent une super ambiance. Merci à vous pour Peter.

— Mais c’est tout naturel, chère madame.

 

17/05/2012

Dora et Odette, suite des Marcheurs

Odette et Dora Potziki assises devant le feu de cheminée de la maison fraîchement baptisée  Corne d’abondance semblaient peu à peu céder à la fatigue au milieu des autres qui s’étaient endormis depuis longtemps.

« À quoi rêvez vous Odette ? murmura Dora

— J’imagine un espace immense, la Terre sur des kilomètres à la ronde, des arbres fruitiers, une rivière claire où s’abreuver, des chemins, des inconnus qui s’y baladent tranquillement, sans entraves, des vivants qui laissent vivre, et Peter toujours cheminant, sans peine. Nous respirons, nous nous sentons légers. Il fait beau.

— Pourquoi des inconnus dans votre monde de rêve ? finit par demander d’une voix ensommeillée Dora

— Pour le repos.

Des loups se mirent à pousser de longs appels lugubres. Odette et Dora s’endormirent à leur tour après s’être serré la main en silence, en espérant pour le lendemain une révolte des gueux, ces anonymes parmi les anonymes, illustres inconnus, allaient-ils sortir de leur torpeur ou suivre les ordres que leur donneraient ceux qui les méprisaient depuis si longtemps ?