10/04/2008
Condition de la femme
"John dormait et je répugnais à l’idée de le réveiller, aussi suis-je restée immobile, à regarder s’étirer cette clarté ondoyant sur le papier peint - jusqu’à en avoir des frissons. La forme floue derrière le motif paraissait agiter le papier comme si elle voulait s’en échapper. Je me suis levée sans bruit pour toucher le papier et voir s’il bougeait vraiment. Quand je me suis recouchée, John était réveillé.
Qu’est-ce qu’il y a, ma petite fille ? a-t-il demandé. Cesse de te promener comme ça tu vas prendre froid !
J’ai pensé que c’était une bonne occasion pour lui parler ; je lui ai dit que mon état était loin de s’améliorer et que j’aimerais qu’il m’emmène hors d’ici.
Mais ma chérie ! la location prend fin dans trois semaines et je ne vois pas comment nous pourrions partir avant : chez nous, les travaux ne sont pas terminés et il m’est tout à fait impossible de quitter la ville actuellement. Bien sûr, si tu courais le moindre risque, je trouverais le moyen, je le ferais, mais tu vas vraiment mieux, chérie, que tu t’en aperçoives ou pas. Je suis médecin, ma chérie, et je sais. Tu as pris du poids et des couleurs, tu as meilleur appétit, je me sens vraiment rassuré à ton sujet.
Je n’ai pas pris un gramme, ai-je répondu, j’aurais même plutôt maigri, j’ai peut-être meilleur appétit le soir quand tu es là, mais le matin, quand tu t’en vas...
Le petit cœur adoré, m’a-t-il dit en m’étouffant d’un baiser, il sera malade autant qu’il voudra ! mais en attendant, essayons de dormir, nous en reparlerons demain matin.
Alors, tu ne veux pas partir d’ici ? ai-je demandé, l’air triste.
Comment le pourrais-je, chérie ? Il ne reste plus que trois semaines, après quoi nous ferons un beau petit voyage de quelques jours en attendant que Jennie prépare la maison. Je t’assure, chérie, que tu vas mieux !
Physiquement peut-être, mais...
Je me suis arrêtée net car il s’était redressé et me lançait un regard si sévère, si lourd de reproches que je ne pouvais plus articuler un seul mot.
Ma chérie, dit-il, je t’en supplie, pour l’amour de moi, de notre enfant, de toi-même, ne permets plus un seul instant à une telle idée d’envahir ta pensée. Il n’y a rien de plus dangereux, de plus destructeur pour un tempérament comme le tien. C’est une idée absurde et fausse. Je te l’affirme. Ne peux-tu faire confiance au médecin que je suis ?
Alors, bien sûr, je n’ai rien ajouté et nous nous sommes rendormis. Il me croyait endormie la première, mais je ne l’étais pas, et je suis restée là, étendue, éveillée pendant des heures, essayant de démêler si les deux motifs du papier peint bougeaient ensemble ou séparément."
Texte sur ce site
Charlotte Perkins Gilman
09:07 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)
09/04/2008
Fargo
Fargo, un film de Joël et Éthan Coen, vu en DVD tout à l’heure. Écrit sur la pochette : « Aurez-vous le courage d’en rire ? ». Pour ma part, non. En résumé, jerry Lundegaard, genre beau-fils modèle, a l’idée consternante de faire kidnapper sa femme par deux hommes dans la galère, afin de demander une rançon à son beau-père. S‘en suivra une tuerie : trois témoins sont abattus, l’épouse aussi parce qu‘elle s’est « mise à gueuler » dixit laconiquement le tueur à son co-équipier, tout en ayant du mal à détacher les yeux d’un feuilleton à l’eau de rose. Le kidnapping a réveillé chez eux une soif d’argent qui étouffe la moindre étincelle d’intelligence. Les mots leur sont inutiles à ce stade, ils tuent comme on prend la tangente, à la plus petite contrariété. La femme flic qui a mené l’enquête et ses collègues parlent peu eux aussi, ils semblent assez sonnés comme presque tous les personnages de ce film poignant où tout le monde semble vouloir prendre ses distances avec la réalité.
18:46 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (2)
Dangers de l'isolement
Lorsqu'un enfant est enfermé j'ai entendu dire, "en lui-même", on est en droit de se demander si la société ne lui a pas plutôt fermé sa porte, autrement dit « bloqué son pas » en raison d’une intolérance à sa différence, avant d’invoquer un repli sur soi ou enfermement en soi qui lui serait « naturel » étant donné tel ou tel diagnostic ou problème particulier. Ma vision des choses est que l’enfant, quel qu’il soit, s’il se sent accueilli par la société, manifeste un intérêt pour la vie et ne demande qu'à s'adapter, du moins le mieux possible, à un environnement ouvert. L'état de vase clos non communicant n'est pas naturel chez l'homme, (hormis le coma profond).
Sophie
Enfants isolés en danger :
« Depuis la médiatisation, en février dernier, de l’affaire de Jersey, c’est une véritable chape de plomb qui est en train d’éclater. Des témoignages semblent révéler l’existence de nouveaux cas de maltraitance commis dans plusieurs autres institutions de l’île. Les victimes présumées auraient tenté à l’époque de dénoncer les faits mais elles n’auraient pas été écoutées. Une culture du secret, dénoncée par les associations de défense de victimes, destinée semble-t-il à préserver les intérêts de la petite île anglo-normande. » C’est ICI
07:19 | Lien permanent | Commentaires (0)