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19/09/2008

Article du jour

« Hier, la ministre de la Justice Rachida Dati s’est rendue à la prison de Rouen pour présenter des consignes «concernant l’affectation et la surveillance des détenus à risques» (lire ci-contre). A aucun moment, pourtant, dans ses recommandations, elle n’a annoncé la fin de cette pratique de la surveillance d’un détenu par un autre. «Seule la cellule individuelle est à même de garantir l’intégrité des détenus», rappelle Hugues de Suremain de l’Observatoire international des prisons (OIP). Avec 63 783 détenus pour 50 835 places, on en est loin. Et Rachida Dati, avant l’été, a fini par déclarer l’abandon de ce principe «un détenu par cellule» - qui fait pourtant partie des règles pénitentiaires européennes que la France est censée respecter. » Libération

 

16/09/2008

Vigilance

L’éditorial du Monde du 14/15 septembre 2008 « Meurtre en prison » a particulièrement attiré mon attention, en voici un extrait : 

«  Ne craignons pas de le répéter : les prisons françaises sont un scandale de la République. Un scandale dont les pouvoirs publics semblent s’accommoder, en dépit de multiples commissions d’enquête et des mises en garde incessantes sur les dangers de la surpopulation carcérale. Le meurtre d’un jeune homme, égorgé par son codétenu à la maison d’arrêt de Rouen, dans la nuit du 10 au 11 septembre, en témoigne une nouvelle fois.

Qu’on en juge. Un garçon de 26 ans, qui encourait une peine légère (récidive de conduite en état d’ébriété et port d’armes blanches), a été mis en cellule avec un homme impliqué dans une affaire d’homicide, atteint de troubles du comportement et qui avait été placé à l’isolement en raison d’un comportement agressif envers ses codétenus. Malgré ses antécédents et sa dangerosité, la principale prise en charge de ce détenu a consisté à le placer dans le huis clos d’une cellule avec un autre jeune homme qui est devenu sa victime. Le fait que le malheureux ait été d’accord ne change rien à l’affaire.

Il faut le redire. La peine subie par un condamné est l’enfermement, la privation de liberté. Dans une démocratie moderne, les autres droits d’un détenu, et d’abord celui à son intégrité physique, doivent être garantis par l’État. Les prisons ne doivent être ni un pourrissoir ni un endroit où un délinquant mineur peut être mis au contact de criminels. Et encore moins risquer sa vie dans un lieu qui, plus que d’autres, est placé sous la responsabilité de l’État. » ...

15/09/2008

Suite de l'article précédent

Géopolitique : 

La hantise de l’encerclement 

«  … À défaut d’être la source de la crise afghane, les zones tribales pakistanaises en sont un des aliments. Islamabad n’a pas su, ou voulu, éradiquer les groupes talibans et les noyaux d’Al-Qaida qui y ont trouvé refuge. Une lourde équation géopolitique explique cette impuissance, ou cette mauvaise volonté. En premier lieu, la frontière afghano-pakistanaise (dite « ligne Durand », tracée par les Britanniques en 1893) traverse artificiellement des populations pachtounes qui ne l’ont jamais vraiment reconnue. Sa porosité est un défi permanent : les Américains en font les frais comme jadis les Soviétiques.

En second lieu, le statut administratif de ces zones au sein de l’État pakistanais en fait des entités quasi indépendantes, régies par l’ordre coutumier. La Constitution et la législation pakistanaises ne s’y appliquent pas. Islamabad s’est résolu à cette généreuse dévolution des pouvoirs pour mieux désamorcer un nationalisme pachtoune qui a en permanence menacé de déstabiliser sa frontière occidentale. Ce souci de ne pas s’aliéner les Pachtounes est d’autant plus fort que la construction nationale pakistanaise est fragile : l’islam partagé - raison d’être de la fondation du pays en 1947 sur les décombres de l’Empire britannique des Indes - n’a pas suffi à transcender des identités ethniques (pendjabie, sindhie, baloutche, mohajire, pachtoune) aux penchants centrifuges.

Mais cette géopolitique des zones tribales ne s’éclaire vraiment qu’au miroir du conflit avec l’Inde, l’ennemi historique. Depuis sa naissance, le Pakistan vit avec la hantise de l’encerclement : à l’est, la menace de l’Inde ; à l’ouest, le péril d’un Afghanistan attisant l’irrédentisme pachtoune (le « Pachtounistan »). Pour les Pakistanais, c’est trop. À leurs yeux, l’Afghanistan doit être impérativement inféodé, « finlandisé », afin d’ouvrir une profondeur stratégique vitale en cas de guerre avec l’Inde. Toute la doctrine stratégique d’Islamabad se résume à cette obsession.

Aussi le profil des maîtres de l’Afghanistan doit-il répondre à une triple caractéristique : ils doivent être des Pachtounes (maîtres à Kaboul, ils se détourneront d’un « Pachtounistan »), adeptes de l’islamisme (allergique au nationalisme) et installés par le Pakistan. À la veille de l’effondrement du régime communiste afghan en 1992, l’Inter Service Intelligence (ISI), les omnipotents services secrets de l’armée pakistanaise, avait parié sur Gulbuddine Hekmatyar. Ce fut un échec piteux. Dans les années 1994-1995, la solution de rechange vint des talibans, à l’époque mis sur orbite par Benazir Bhutto avec la complicité des Américains et des Saoudiens.

Depuis le 11 septembre, Washington demande à Islamabad de traquer ses anciennes créatures. C’est forcément compliqué, surtout à un moment où le rôle joué par l’Inde en Afghanistan rallume la paranoïa de l’encerclement. Le réchauffement stratégique indo-américain, qu’illustre un récent accord de coopération nucléaire civile, avive ce sentiment d’insécurité.

Dans ces conditions, l’ISI - échappant largement au pouvoir civil - entend bien conserver ses pions, et ces derniers se trouvent pour l’heure dans les foyers talibans des zones tribales. » …

 

 

 

Frédéric Bobin

 Le Monde