17/06/2019
La musique magique
21:57 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)
Pas eu besoin du parapluie
Il faisait plutôt beau samedi à Outreau. Je savourais ce moment de solitude le long de la Liane, mais, un moment, une joggeuse m'a inspirée une envie d'un petit contact avec elle. Je lui demandai quelque chose qui ne mange pas de pain : "Le port, c'est bien tout droit, n'est-ce pas ?"(évidemment, andouille de moi, il n'y a qu'à suivre la Liane, c'était tellement évident, mais que demander d'autre à la personne, qui ne mange pas de pain ?)
— Oui, mais après il y a des travaux et là vous devrez tourner un chouïa à droite pour les contourner.
— Merci.
Je compte y aller cet aprèm, aussi j'étale ma fine popeline noire sur le banc à proximité et me pose dessus. Je jette un coup d'œil à droite pour voir le chemin parcouru depuis Outreau Leclercq et je vois la joggeuse qui a rebroussé chemin. Elle va penser que j'ai renoncé à aller au port.
Arrivée à mon niveau elle me hèle : "Venez, ma voiture est juste garée là, dit-elle en pointant un minuscule parking, c'est mon chemin, le port, je vais vous y déposer."
— D'accord.
Je me lève, charmée, et ne me rends pas compte que je laisse ma popeline sur le banc.
Dans la voiture cela tourne autour du sujet tout simple "d'où venez-vous comme ça ?" J'ai évidemment pigé qu'elle ne s'attendait pas à ce que je lui dise "de chez Leclercq" et lui nomme ma ville d'habitation. Elle répond qu'elle ne pourrait pas vivre au fin fond de l'Artois. Il lui faut la mer. D'autant que "Boulogne, c'est si beau". Je confirme.
Je lui demande si les anglais, qui viennent en moins grand nombre qu'autrefois à cause du Tunnel sous la Manche, ne manquent pas. "Si, ils manquent", mais du point de vue tiroir caisse, a-t-elle précisé. Car les frontaliers, du moins à Boulogne, ont l'ADN chatouilleux, la mémoire des luttes contre l'ennemi d'antan : l'anglais. C'était Napoléon l'agresseur, en dernier lieu, et donc les français qui étaient belliqueux. Mais le réflexe défensif est très fort, inscrit dans les gènes, juste un instinct en fait. Mais ce ne serait pas honnête de ne pas mentionner son argument : les anglais ne voient pas Boulogne. Ne regardent pas Boulogne. Ils venaient juste pour consommer : baguette et vin. Donc ma théorie sur l'ADN... j'en prends et j'en laisse finalement. Les anglais ne leur côté, manqueraient de considération pour Boulogne pour beaucoup de ces visiteurs.
Elle me dépose. "Salut charmante dame" lui dis-je. Je me promène un peu sur le port, et en remontant la passerelle j'avise une vieille dame :
"Dites-moi, madame, il y a encore beaucoup de dockers à Boulogne ?"
"Oh, juste il reste des dockers de commerce."
"Ils sont où ? car je fais un reportage."
"Là-bas, à l'over port."
D'accord, merci madame j'irai tout à l'heure.
Quand je rapporte à midi les propos de la vieille dame, Patrick me dit que c'est tout faux. Mais j'avais compris que en dépit du sourire qu'elle m'adressait, de sa gentillesse évidente, elle ne savait plus vraiment à propos des dockers et elle a dit ce qui lui passait par la tête.
Bref, sur le chemin du retour, d'un coup, la popeline se rappelle à moi ; il me semble que j'étais un peu plus encombrée auparavant. J'imagine ma conductrice qui va la porter, cela lui fera un souvenir de moi, car j'ai dû la laisser sur le siège de la voiture.
Soyons philosophe me dis-je, l'important est que les clés de la voiture soient dans ma poche de jupe. Les jupes ne s'oubliant pas sur le dos d'un siège, il est toujours plus prudent, soit dit en passant d'y ranger ses clés.
J'aperçois bientôt de loin le banc duquel je suis partie ; m'en rapprochant, je crois que les branches de l'arbre à côté du banc projettent une ombre sur celui-ci, une ombre qui a de plus en plus la forme d'un vêtement à manches. Je retrouve ma popeline avec un certain contentement.
La jeune femme m'a dit d'aller à la haute ville, dont elle m'a montré la direction quand nous sommes passées près d'une intersection tout à l'heure.
Hélas, je suis fatiguée l'après-midi. J'ai trouvé au Cultura de Leclercq un livre de poésie qui ne coûte pas quatre euros. Il est minuscule de format, entre dans la pochette où je range mes papiers mais vous l'avez compris, il est immense. D'une poésie que je suis capable d'appréhender, qui entremêle la poésie, la philosophie non rationnelle, c'est-à-dire fortement imprégnée de mysticisme oriental. Il s'agit du poète Khalil Gibran. Dans ce minuscule livret, il aborde une multitude de sujets, longuement, et cela ressemble à la multiplication des pains.
À partir de cinq ou six pains, je ne sais plus, Jésus nourrit une foule. Le livret acheté à ce Cultura s'intitule Le prophète. Il est toujours dans ma pochette. Il ouvre l'esprit notamment sur ce qu'est la douleur, ou ce qu'elle est dans certains cas, plutôt, quand les habitants d'une ville que le poète doit quitter lui posent la question "qu'est-ce que la douleur ?". Un début de compréhension sur "de quoi est fait le masochisme" peut se faire dans l'écoute de la réponse du prophète. La douleur en certains cas, peut être une recherche de cette douleur de la part d'une personne qui n'a pas l'entendement nécessaire pour comprendre quelque chose qui la dépasse... tant que la personne n'a pas saisi la nature malsaine d'une relation malheureuse par exemple, elle répète, a besoin de revivre cette douleur, le processus devient un "chemin du masochiste" peut-être, pour comprendre sa douleur. Il s'agit en somme d'un auto harcèlement. Par contre, entre le prophète et les habitants de cette ville, qui le questionnent avant qu'il ne prenne le bateau et quitte leur ville pour longtemps, c'est une relation d'amour. Ils souffrent juste de le voir les quitter. Rien à voir avec le masochisme les concernant. Pour les masochistes, j'imagine que ça devient mortifère si la lumière tarde à se faire en eux. Khalil Gibran peut aider à faire cette lumière. Son prophète ne parle pas du masochisme mais de la douleur ; cependant, par déduction ce qu'il dit à propos de la douleur peut éclairer des zones d'ombre sur certains processus de la souffrance que d'aucuns se donnent ou tentent d'infliger à quelqu'un d'autre par un chemin jumeau à celui du masochisme. Le sadisme et le masochisme, ce sont les ténèbres.
Donc l'après-midi j'ai lu dans la voiture, par intervalles, entre l'écoute des nouvelles chansons de Paul Personne, à la radio — qui chante "on est toujours l'autre de quelqu'un" — et de temps à autre un roupillon dû à la marche du matin : du port jusque Outreau avec des chaussures inadéquates. Pas de Haute ville donc, ce sera pour une autre fois. Cet après-midi là, je n'étais pas l'autre de quelqu'un, dans le sens de la chanson qui parle de l'exclusion, j'étais l'hôte de Khalil Gibran, une intelligence puissante. L'hôte : qui accueille et est accueilli. C'est merveilleux le pouvoir lire. Et je n'oublie pas la charmante joggeuse : une histoire d'autre, bien vécue elle vis à vis de moi, et moi vis à vis d'elle, donc une histoire d'hôtes. Reste à faire un effort par rapport à nos amis les anglais, ou de la part, plutôt, de nos amis et très proches voisins, les anglais. Ouvrez les yeux sur Boulogne les anglais, Open your eyes ! Merci pour eux, ils le valent bien. Ne nous la faites pas à l'envers et venez nombreux à Boulogne.
09:31 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)
15/06/2019
Ce matin
Hier j'ai vu le film d'Arte concernant le viol d'une enfant. Qu'est-ce qu'un violeur ? C'est quelqu'un qui veut posséder autrui comme sa chose.
Le film est pessimiste car on voit la victime assoiffée de vengeance, donc non libérée, être toujours la chose du violeur.
Je trouvais l'actrice subjectivement laide tant elle jouait bien la haine. Pour le regard d'enfant le visage de Claudia Schieffer est laid s'il est pétri de haine.
La victime a beau prier, rien n'y fait. Si au fait, quelque chose y a fait : elle n'a pas tué l'enfant du violeur comme on laisse penser dans ce film qu'elle s'apprête à le faire. Mais jusqu'au bout on laisse entendre qu'elle pourrait bien se jeter dans le vide. Donc, le violeur d'antan, paie son crime de la plus mauvaise façon : celui qu'il a été a gagné sur celui qu'il est devenu. Celui qu'il a été, possède toujours "la chose" et revient au présent flinguer celui qu'il est devenu. Quand je vous disais que cette fiction est pessimiste. Une autre sur le même sujet où il y a rédemption de celui qui veut posséder l'autre, le violeur, et où la victime n'est plus victime et devient libre, serait une idée pour renforcer le bien en soi.
Ce matin, je prends mon grand parapluie cloche car je retourne à Outreau, et donc, je vais en bord de Liane respirer et regarder les oiseaux, les écouter aussi.
06:13 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)