Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

31/07/2007

faire flèche de tout bois avec H.G.Wells

Lisez-vous les préfaces des livres ? C’est toujours très instructif. Je viens de lire celle du bouquin « The Empire of the Ants » édité chez LM dans la série anglaise bilingue, du traducteur Joseph Dobrinsky. Il propose une approche analytique des récits, en rapport avec le cheminement social de H.G.Wells, son vécu familial, son époque, ainsi qu’une étude rapide mais perspicace de son mode de travail lié parfois aux circonstances comme vous pourrez le constater avec cet extrait :

 

"Les circonstances dans lesquelles furent conçus les contes inauguraux en expliquent les sujets, la brièveté, le ton. En 1894, le Pall Mall Budget, jusqu’alors simple supplément hebdomadaire d’un journal à grand tirage, la Pall Mall Gazette, se préparait à prendre plus d’ampleur en devenant autonome. Son rédacteur en chef, Lewis Hind, s’ouvrit au jeune Wells du projet d‘« utiliser mes connaissances particulières de la science … dans une série de nouvelles « à lire en une fois » et j’appliquai mon esprit à imaginer des histoires possibles dans le genre qu’il requérait … La première que je produisis avec effort fut Le Bacille dérobé et, au bout de quelque temps, j’acquis une certaine adresse à développer des incidents et des anecdotes à partir de petites virtualités scientifiques ou prétendument telles. »

En matière d’hypothèses scientifiques, le jeune auteur a, de toute évidence, fait flèche de tout bois. Nous le verrons ici, mettre tour à tour à contribution : la bactériologie, la botanique, l’astronomie et la zoologie, l’ornithologie, la minéralogie. L’entomologie présidera à la septième nouvelle, plus longue. Or, dans chacun des cas, la méthode est la même. Wells s’emploie à accréditer une anecdote sensationnelle grâce à une attention minutieuse aux détails, garante de vraisemblance. Ainsi explorerons-nous un laboratoire de bactériologiste ; apprendrons-nous le fonctionnement d’une serre pour plantes exotiques, celui d’un télescope, les spécificités d’un estomac d’oiseau, la chimie du carbone … L’adhésion du lecteur profane est acquise et brièvement maintenue à ce prix. Cette technique traditionnelle étend en somme, au fantastique pseudo-scientifique ce qui valait, chez des auteurs plus anciens, pour le surnaturel."

Dobrinsky

 

28/07/2007

Le logiciel

Expressions du jour «  se perdre dans le labyrinthe de ses pensées », avec celle-ci en indice directionnel  : « ne pas chercher midi à quatorze heures ».

Ces deux expressions me sont venues à l’esprit peu après cette contrariété matinale : d’un côté, je ne voulais pas renoncer à aller chercher un être cher qui nous attend pour passer un dimanche ensemble, de l’autre l'intention de me rétablir au plus vite de ce lumbago qui me handicape si fortement au moindre mouvement, que même conduire serait fastidieux, avec le risque de rester « naturellement » coincée au volant. 

Désirant reporter à plus tard la décision j'ouvris un   magazine et tombai sur ces lignes : « Theodor Adorno fait à Wagner une autre critique. Pour lui, l’attente vaine, coïncidant avec le sentiment que la justice ou l’absolu ne viendront pas, est un aspect fondamental de notre présence au monde »

Les deux expressions me vinrent alors à l’esprit comme sorties d‘un logiciel, en ordre. Je posai la revue, portai attention à cette douleur au bas du dos, et pris ma décision : si je voulais voir notre ami encore un bout de temps, il fallait se résoudre à le décevoir pour cette fois.

 

L'extrait concernant la critique de Théodore Adorno est tirée de philosophie magazine. Elle se pousuit comme ceci "...Or l'attente chez Wagner serait truquée puisque sa résolution serait pré-programmée."     

 

12:00 Publié dans Culture | Lien permanent | Commentaires (0)

27/07/2007

Joie de vivre

d12118d6839f23aab909ee8f2fc81dbc.jpgJe vous offre cet extrait du Grand Meaulnes. Il s’en dégage quelque chose de l’ordre de la pure joie de vivre. À bientôt !

" Il arriva, sans rencontrer personne, au bas d'un escalier de bois, dans un recoin de cour obscur. L'haleine glacée de la nuit vint lui souffler au visage et soulever un pan de son manteau.

Il fit quelques pas et, grâce à la vague clarté du ciel, il put se rendre compte aussitôt de la configuration des lieux. Il était dans une petite cour formée par des bâtiments des dépendances. Tout y paraissait vieux et ruiné. Les ouvertures au bas des escaliers étaient béantes, car les portes depuis longtemps avaient été enlevées ; on n'avait pas non plus remplacé les carreaux des fenêtres qui faisaient des trous noirs dans les murs. Et pourtant toutes ces bâtisses avaient un mystérieux air de fête. Une sorte de reflet coloré flottait dans les chambres basses où l'on avait dû allumer aussi, du côté de la campagne, des lanternes. La terre était balayée, on avait arraché l'herbe envahissante. Enfin, en prêtant l'oreille, Meaulnes crut entendre comme un chant, comme des voix d'enfants et de jeunes filles, là-bas, vers les bâtiments confus où le vent secouait des branches devant les ouvertures roses, vertes et bleues des fenêtres.

02a70e3bc1fe01322bdec26c5eea9641.jpgIl était là, dans son grand manteau, comme un chasseur, à demi penché, prêtant l'oreille, lorsqu'un extraordinaire petit jeune homme sortit du bâtiment voisin, qu'on aurait cru désert.

Il avait un chapeau haut de forme très cintré qui brillait dans la nuit comme s'il eût été d'argent ; un habit dont le col lui montait dans les cheveux, un gilet très ouvert, un pantalon à sous-pieds... Cet élégant, qui pouvait avoir quinze ans, marchait sur la pointe des pieds comme s'il eût été soulevé par les élastiques de son pantalon, mais avec une rapidité extraordinaire. Il salua Meaulnes au passage sans s'arrêter, profondément, automatiquement, et disparut dans l'obscurité, vers le bâtiment central, ferme, château ou abbaye, dont la tourelle avait guidé l'écolier au début de l'après-midi.

Après un instant d'hésitation, notre héros emboîta le pas au curieux petit personnage. Ils traversèrent une sorte de grande cour-jardin, passèrent entre des massifs, contournèrent un vivier enclos de palissades, un puits, et se trouvèrent enfin au seuil de la demeure centrale.

Une lourde porte de bois, arrondie dans le haut et cloutée comme une porte de presbytère, était à demi ouverte. L'élégant s'y engouffra. Meaulnes le suivit, et, dès ses premiers pas dans le corridor, il se trouva, sans voir personne, entouré de rires, de chants, d'appels et de poursuites ".

Alain Fournier

 

 

 

 

 

21:45 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)