17/03/2012
Décalage
Nous avons trop souvent un train de retard sur l'histoire. Dans vingt ans ou peut-être plus, de jeunes journalistes et historiens diront : "Pourquoi ne creusait-on pas de puits en Afrique dans les années 2010, alors que c'était tellement urgent de remédier au manque d'eau. Les famines qui découlèrent de la sécheresse provoquèrent l'exode de nombreux africains..." Ce sera la grande question, comme on se demande encore pourquoi aujourd'hui les alliés, durant la seconde guerre mondiale, n'ont pas bombardé les lignes de chemins de fer qui conduisaient aux camps de concentration, etc.
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15/03/2012
Les rives
C’était un matin sans pluie ni soleil. La végétation encore ratatinée en ce début du mois de mars laissait s’imposer le gris, celui de l’eau du canal, miroir éteint aux ondulations verdâtres, celui du ciel, du bitume des étroits chemins de halage, un gris aux nuances noyées dans l’uniformité de sa masse, qui mettait au placard les rares promeneurs. Il y avait ce matin là, un jeune homme qui marchait d’un pas rapide le long de la berge en poussant un caddy vide, il était accompagné d’une personne falote à force de passer inaperçue, comme le sont les caniches et les ombres pour les observateurs distraits. Sur l’autre rive, une femme passait en vélo. L’homme donna de la voix, une voix de basse puissante et prononça des paroles abruptes. Des mots où rien ne vibrait qu’une sorte d’indignation spontanée, mais qui opérèrent une trouée, une aération du placard, et brisèrent l’inertie, la torpeur des alentours : « Hé ! cria-t-il Hé ! I love you ! Je t’aime ! J’vais t’violer ! » La cycliste se retourna et vit la haute silhouette baraquée de l’homme-enfant au caddy vide, à ses côtés elle crut voir trottiner un enfant. Elle eut sans doute la sensation d’une maladresse atavique des pauvres, accéléra par envie de tranquillité, continua un moment, tourna à droite par deux fois et finit par tomber sur le promeneur au caddy qui lui opposa un visage fermé, comme si la marche monotone l’avait fait se perdre dans un mauvais rêve. Il l’ignora complètement, il avait déjà oublié l’injure de tout à l’heure, lancée à la paralysie ambiante des choses, à ce qui lui avait semblé être un estomac plein en train de péter dans la soie.
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13/03/2012
Mamma à vie
Un autre grand blond ma alpaguée aujourd’hui, qui n’avait rien à voir avec celui d’hier dans la pharmacie. Maigrichon, les yeux très bleus et parlant avec moins d’aisance. « Comme vous me voyez là, je viens de sortir de prison et j’n’ai rien mangé… » C’est con d’aller dans le centre-ville les poches vides, je m'en veux. Le jeune homme pathétique est élégant, il s'en va en faisant un salut compréhensif. Il y avait empathie, c’est au moins ça de positif, mais je n'ai pas osé l'inviter à venir manger à la maison. Une responsabilité que j'aurais prise si je vivais seule.
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