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25/07/2007

le coin culture

Enquête

Chacun dans son coin avec sa culture ? Rien de nouveau sous le soleil. Cet extrait d'un article si la question vous intéresse : 

Comment une enquête sur la culture des jeunes vous a-t-elle menée à une interrogation sur les transmissions entre les générations ?

Sans savoir exactement ce que je cherchais, je partais d’une question de base qui était : en quoi les pratiques culturelles, les pratiques de loisir sont-elles liées aux pratiques de communication, et comment s’inscrivent-elles dans les sociabilités quotidiennes ? Les questions touchant à la crise des transmissions sont venues, outre de mes lectures du moment, de l’énorme différence entre le lycée Boileau et les lycées de banlieue.
Concrètement, je voyais que le modèle de la reproduction culturelle, tel que l’avaient formulé Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron dans Les Héritiers (1), ne fonctionne plus que dans des conditions sociales très particulières, comme celles du lycée Boileau. L’évitement scolaire et la sursélection sociale en font une sorte de niche, où se transmet une « sous-culture du haut ». Les parents y ont une attitude très ferme concernant la transmission culturelle : les enfants sont mis au conservatoire, ils ont systématiquement des vacances à vocation culturelle (séjours linguistiques par exemple), ils sont amenés au musée… Il y a une volonté énorme, un effort sans relâche de la part des parents pour maintenir un lien avec la culture humaniste. Et surtout des stratégies pour éviter qu’entrent dans leur foyer les nouveaux médias. C’est cela qui m’a frappée : j’avais en face de moi des jeunes très sympathiques, qui me disaient qu’ils ne pouvaient pas regarder la télévision, que les jeux vidéo c’était éventuellement chez les copains mais pas chez eux – on voyait bien que c’était une culture encadrée. Du coup, l’école intervient là en renforcement de l’action parentale, comme dans le modèle des Héritiers. Mais, encore une fois, c’est un contexte très particulier.

Qu’avez-vous observé dans les lycées de banlieue ?

Le constat nouveau, c’est qu’il n’y a plus de transmission volontaire de la part des parents. Le rapport à la culture humaniste, héritée, s’est complètement perdu, y compris chez les enfants d’origine favorisée. On observe, en revanche, un renforcement très fort des relations entre pairs, et de la pression culturelle imposée par les groupes, surtout pour les garçons. Chez les jeunes, les produits culturels sont très liés à leur capacité à créer du lien social. Ce qui circule donc, c’est beaucoup de musique (r’n’b, rap, rock essentiellement), des contenus télévisuels pour les filles et des jeux vidéo pour les garçons, tout cela encouragé par la démultiplication des pratiques de communication : portables et SMS, chats sur Internet. Et dans ce système, il est très difficile pour les jeunes d’aimer quelque chose que les autres n’aiment pas. Certains élèves peuvent avoir des stratégies, et des pratiques, dont ils ne parlent jamais au lycée, mais elles ont en général du mal à perdurer – parce qu’écouter du jazz, par exemple, n’a aucune rentabilité sociale. La transmission verticale, venant des parents, n’est donc plus possible, parce qu’elle est trop contrariée par la normativité de la culture horizontale, la culture des pairs.

Pourtant, cette « tyrannie de la majorité » chez les jeunes n’est pas un phénomène nouveau…

Non, mais ce qui est peut-être nouveau, c’est qu’avant on était dans un conflit de générations, avec une culture juvénile dressée contre la culture des parents. Aujourd’hui, tout cela se passe dans une ambiance de cohabitation très paisible. Notamment parce que les enfants se sont vus dotés d’une autonomie relationnelle, c’est-à-dire de la possibilité de prolonger au sein du foyer la vie avec ceux de leur âge. C’est une des conséquences de la diffusion de nouvelles normes familiales, où chacun doit pouvoir désormais développer ses goûts personnels, sans que l’on ait à juger.
C’est très important car désormais les foyers sont des territoires clivés selon les générations, où l’on ne trouve plus d’objet culturel commun. La chambre des enfants est ainsi devenue un espace personnel (les parents frappent avant d’entrer en demandant s’ils ne dérangent pas), avec souvent tout l’éventail des nouveaux médias qui permettent d’entretenir leurs pratiques culturelles : la télévision, l’ordinateur, les jeux vidéo, Internet, sans compter évidemment le téléphone portable.
Je pense que cette individualisation, cette privatisation de la culture pour les jeunes, autorisée par les parents, financée par eux sans aucune conflictualité, est un phénomène franchement nouveau, qui contribue massivement à renforcer le poids de la culture générationnelle au détriment de celle des parents.

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Cogitez bien !

 

22:50 Publié dans Culture | Lien permanent | Commentaires (0)

Dorian Gray

701dd426f89c4bf83313e85f115e644b.jpgLa vie est faite « de menus avatars » qui obligent parfois à ralentir le pas. L’avantage de ce contre-temps, dans le sens où il est devenu inutile de lutter contre, est la possibilité de flâner loin des champs de courses et de porter un peu plus d’attention à ce qui vous aurait paru tout à fait insignifiant auparavant : des livres, par exemple émergent inopinément dans le quotidien, comme celui d’Oscar Wilde intitulé « Le portrait de Dorian Gray », sur le point de tomber de l’étagère et qui m’est finalement resté entre les mains, le temps de lire la préface, des bribes du dossier historique (pas mal ces Pocket Classiques), et de resituer du même coup l’histoire du personnage : excessivement beau au goût de ses contemporains ; avait-il succombé à son propre charme de ce fait là ? Je ne sais pas, j’aurai probablement un début (tout au moins) de réponse en relisant ce bouquin, dans les deux sens du terme. Ce que je me promets de faire dès ce soir. Si le cœur vous en dit, lisez cet extrait du dossier historique, qui aborde le thème de l’éternelle jeunesse liée au pouvoir, plus que jamais d’actualité même si les arguments de dissuasion ont heureusement beaucoup changé :

Le rêve de l’éternelle jeunesse

Dans les contes de fée existe parfois, en ces pays lointains, une source magique qui, à l’instar de la fontaine de Jouvence, donne à ceux qui boivent son eau la jeunesse éternelle. Au héros (ou à l’héroïne) d’aller en quérir pour le roi despotique ou la méchante belle-mère. D’autres fictions incarnent ce même rêve.

Goethe a repris dans ses versions de Faust une légende populaire allemande. Le savant cède à la tentante proposition de Méphistophélès, l’esprit du mal : il échange son salut contre le bonheur matériel. Il ne sera sauvé in fine que par son constant désir d’idéal (il n’est pas enlisé dans les jouissances vulgaires) et par le pur amour que lui a porté Marguerite. Les pièces de Goethe ont à leur tour donné naissance à d’innombrables œuvres. Citons au cinéma, Faust de Murnau (1926), La beauté du diable de René Clair (1950) où le vieux savant retrouve la jeunesse sous les traits lumineux de Gérard Philippe, ou Marguerite et le diable d’Autant-Lara (1955). Maturin dans Melmoth, imagine en 1820 un héros faustien qui cherche en vain, tout au long du roman, à se dégager du contrat satanique qui assure sa domination et son immortalité mais le voue aussi à la damnation. Le roman, qui vise à inspirer l’horreur du péché et la méfiance envers les biens matériels, a connu un immense succès en Angleterre et en France où il est presque aussitôt traduit.

Balzac en reprend l’argument dans Melmoth réconcilié en 1835 ; il en modifie le dénouement mais son intention est tout autant morale.

Castanier conclut un pacte diabolique avec un mystérieux inconnu qui, en échange de son âme, lui confère l’immortalité et la toute-puissance sur les choses matérielles. « Sa forme intérieure avait éclaté. En un instant, son crâne s’était élargi, ses sens avaient grandi. Sa pensée embrassa le monde, il en vit les choses comme s’il eût été placé à une hauteur prodigieuse. » Il choisit alors de satisfaire tous ses désirs, il puise « à pleines mains dans le trésor des voluptés humaines dont la clef lui avait été remise par le Démon ».

Mais ces orgies, loin de lui procurer les jouissances attendues dans leur plénitude, lui font prendre conscience de la vanité des plaisirs. « Cette énorme puissance, en un instant appréhendée, fut en un instant exercée, jugée, usée. Ce qui était tout ne fut rien. » Et Castanier renoncera à ses pouvoirs magiques pour connaître le repentir et la mort du pêcheur.

Nous voilà prévenus ! À demain blogs-trotters

 

11:20 Publié dans Culture | Lien permanent | Commentaires (2)