03/08/2012
Tome 2 Les Marcheurs
La soirée suivait son cours à la Corne d‘abondance tandis que l’hélicoptère du chef de l’État prenait soudain la direction de la base hospitalière ; Le Noble l’avait repérée depuis longtemps déjà, d’autres hélicoptères se joignirent bientôt à eux, ils atterrirent dix minutes plus tard à l’endroit stratégique, où ils débarquèrent en tenue qui pourrait évoquer celle que revêtent les apiculteurs pour s’occuper de leurs ruches. Peter et Janon dormaient, quelques robots furent balayés au lance flamme avant d’avoir pu déclencher le moindre signal d’alarme ou envoyé une quelconque fléchette ; le bruit réveilla en sursaut les dormeurs, la fumée âcre les accula vers les ouvertures d’où ils s’échappèrent pour se retrouver directement en pleine forêt, les quelques résidents qui se trouvaient dans le foyer firent de même, sans défense face à ce raid en train d‘être mené tambour battant par un commando déterminé. Le Noble entendait phagocyter ses rivaux scientifiques selon sa propre méthode : les affaiblir en frappant par surprise leurs protégés, les sentiments représentaient pour lui la faille par laquelle il entendait les faire plier. La vengeance des édiles de Bléassengh serait assouvie grâce à lui, ils leur en seraient éternellement reconnnaissants. Le Noble éructa :
— Attrapez ce Peter et cette Janon, nous avons droit au divertissement après toutes ces contrariétés. Il ne faut pas laisser les factieux qui ont gangrené cette communauté de scientifiques faire le deuil de leur fils aussi facilement. Ils méritent de souffrir longtemps.
— J’admire votre esprit pragmatique, Le Noble. Si nous réussissons à faire rentrer dans le rang cet Hector, la nation en sera renforcée. L’appât du gain et une saine ambition devraient suffire à lui faire attraper notre carotte. Il sera bientôt des nôtres, Le Noble.
Les hommes de Le Noble filèrent dans la forêt en poussant des cris de joie, ils n’eurent pas de mal à attraper Peter, guidés par ses mugissements de panique et Janon qui essayait vainement de le calmer.
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02/08/2012
Lecture du jour
Respect de l’embryon humain : une victoire juridique mais un avenir qui interroge
En France, la législation pose un principe d’interdiction de la recherche sur l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires. Ce n’est qu’à titre dérogatoire que l’Agence de la biomédecine (ABM) peut autoriser ce type de recherche. Or, le 10 mai 2012, à la demande de la Fondation Jérôme Lejeune, la cour administrative d’appel (CAA) de Paris a annulé, en raison de son illégalité, une décision prise par l’ABM, le 20 juin 2008, autorisant un protocole de recherche à partir de cellules souches embryonnaires humaines. Cette décision juridique, reconnaissant l’importance de la protection de l’embryon humain, contraste avec le nouvel échiquier politique qui annonce de très prochaines menaces.
L’arrêt du 10 mai : une victoire sur le plan juridique
La portée majeure de l’arrêt rendu par la CAA mérite d’être soulignée puisque les juges ont fondé leur décision sur une argumentation au fond, une argumentation scientifique(10).
La loi de bioéthique de 2004, en vigueur en 2008, interdit par principe la recherche sur les cellules souches embryonnaires sauf dérogation, sous réserve notamment qu’il soit impossible de parvenir au résultat escompté par le biais d’une méthode ne recourant pas à des embryons humains, des cellules souches embryonnaires ou des lignées de cellules souches ; autrement dit, sous réserve qu’il n’existe pas de méthode alternative d’efficacité comparable.
Le protocole de recherche, autorisé par l’ABM, avait pour finalité la modélisation d’une forme de myopathie, la dystrophie musculaire facioscapulo-humérale (FHS), par l’utilisation de cellules souches embryonnaires humaines porteuses de la mutation responsable de la pathologie. Or, l’ABM, qui avait obligation de motiver sa décision (Article L. 2151-5 IV, du Code de la santé publique, issu de la loi de bioéthique du 6 août 2004), n’a pas apporté la preuve que ces recherches ne pouvaient pas être menées selon une méthode alternative d’efficacité comparable. Et pour cause : celles-ci pouvaient également être réalisées en utilisant des cellules souches adultes reprogrammées (cellules iPS).
En outre, l’article L. 2151-5, issu de la loi de bioéthique de 2004, précise que la recherche sur les cellules souches embryonnaires ne peut être autorisée que si celle-ci est susceptible de permettre des progrès thérapeutiques majeurs. Or, la CAA relève que, sur les deux experts désignés par le directeur de l’ABM, l’un a émis de sérieuses réserves quant à l’existence de tels progrès.
En conséquence, la cour d’appel a conclu à l’annulation de la décision d’autorisation de l’ABM en raison de son illégalité.
Le nouvel échiquier politique : une menace pour l’embryon humain
Au cours de la campagne présidentielle, François Hollande a annoncé qu’il modifiera la loi de bioéthique de 2011 afin d’autoriser la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Peu de temps après son élection, un sénateur socialiste a concrétisé la promesse du Président de la République en déposant une proposition de loi, le 1er juin 2012.
Pour François Hollande, "aucune raison sérieuse" ne s’oppose à cette autorisation de principe. Or, c’est bien un principe fondamental qui est bafoué : celui du respect de l’être humain. En effet, l’article 16 du Code civil dispose que "la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie". En autorisant la recherche sur l’embryon humain, le Président de la République souhaite pallier le retard que la France aurait pris sur d’autres pays. Or, aucun pays ayant autorisé la recherche sur l’embryon depuis plusieurs dizaines d’années (par exemple la Grande Bretagne) n’est en avance sur la France, qui dès lors, ne peut pas être en retard. Certains considèrent même qu’avoir fait le choix politique en 2004 de développer la recherche embryonnaire a justement conduit la France à se faire distancer en matière de recherche sur les cellules souches non embryonnaires (iPS, cellules souches adultes, cellules souches de sang de cordon), dont certaines ont déjà apporté la preuve de leur potentiel thérapeutique.
François Hollande a également précisé que limiter la recherche embryonnaire revient à "porter atteinte à la liberté de la recherche sans réelle justification". Cependant, la liberté de la recherche ne peut être absolue et doit par conséquent être encadrée, comme c’est le cas pour toute activité humaine. Accorder une liberté absolue à la recherche conduirait inévitablement à favoriser des intérêts économiques et financiers au détriment de la protection de l’embryon : la réalité est que l’embryon humain est un enjeu économique important pour l’industrie pharmaceutique. Mais sur quel fondement l’activité scientifique pourrait-elle s’affranchir du principe garantissant le respect de tout être humain dès le commencement de sa vie ?
Pour François Hollande, "des limites sont nécessaires" afin d’éviter les dérives auxquelles peut conduire la recherche sur l’embryon humain. Or, l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 10 mai 2012 démontre que, même sous un régime d’interdiction avec dérogations, la recherche sur l’embryon a déjà généré des dérives. Comment alors croire que l’absence de dérives pourra être garantie avec la mise en place d’un régime d’autorisation de principe, même strictement encadré ?
(10)"Considérant […] [que] les recherches […] pouvaient également être poursuivies en utilisant, à partir de cellules d’épidermes prélevées sur des patients porteurs de la pathologie, des cellules souches adultes reprogrammées (iPS) présentant les mêmes caractéristiques en termes de morphologie, prolifération et pluripotence que les cellules souches embryonnaires humaines(CSEh). […] Que par suite […] la décision attaquée est intervenue en méconnaissance de l’article L2151-5 du Code de la santé publique".
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30/07/2012
Les Marcheurs, suite et fin du premier tome
Hector coupa le son et les cinq protagonistes, les lèvres serrées dans une grimace exaspérée se considérèrent tour à tour en soufflant par les narines, sous l’emprise peut-être de l’esprit taurin dont faisait preuve Dora à ses mauvais moments, laquelle se trouvait toujours en compagnie de Géraldine et Janin dans la salle de réception où l’allocution du chef de l’État avait lieu.
— Nous avons pris notre part à cet échec avec les Bléassenghs murmura le docteur Dross, comme eux nous nous sommes limités trop longtemps à faire de l’animation insipide, non seulement dans les medias mais aussi auprès d’eux. Nous avons maintenu tout ce petit monde dans son inaptitude passagère à la réflexion, nous avons participé au système qui a fait d’eux des consommateurs effrénés c’est-à-dire d’éternels frustrés. Ce que Géraldine réalise auprès des gueux depuis quelques semaines, nous aurions dû le faire auprès des Bléassenghs.
— Cantonnés comme nous le sommes dans nos travaux respectifs, nous n’avions pas le temps de nous rendre compte de grand-chose, s’exclama Hector, nous communiquons très peu, continua-t-il, ce sont eux, ces artistes que sont les Bléassenghs, qui étaient censés nous apporter un peu de spiritualité, au lieu de quoi ils sont devenus des êtres éternellement assoiffés d’animations futiles de toutes sortes qu’ils s’octroient pour certains en produisant des films à la gloire du prêt à penser, des films d’animation dignes de spots publicitaires où tout ce qu’on demande au spectateur, c’est d’admirer à longueur de scénario leur bobine et leur plastique. En guise de spiritualité, le voyeurisme est devenu notre lot de bon citoyen bien savant. Tout le monde s’ennuie dans cette pseudo-culture, nous les premiers. Le réveil n’a pas été facile docteur Dross, je pense que ce n’est pas la peine d’en rajouter avec de la culpabilité.
Jeudi prit la parole :
— Le réveil n’a été facile pour personne. Je dois quitter le pays, Hector. Dora comme Géraldine ne bougeront pas d’ici. Tu ne feras pas d’adieux définitifs à Géraldine, elle t’attendra. À Dora non plus, en tant que mère de tes filles. Mes adieux à Dora seront définitifs, quelque chose s’est cassé entre nous, tu le sais. J’espère que tu ne vas pas me laisser tomber maintenant, je voudrais faire partie du voyage, avec Tom, Odette et Peter.
— Rien n’a été calculé de part et d’autre, Jeudi. Dora a raison, tout s’est fait spontanément, disons que ça aura été une des seules expériences spirituelles que j’aurai eue dans la zone verte, elle fut redoutable. Mais j’oublie les rêves que dame Odette nous fait partager, et la rencontre avec Géraldine qui n’aurait pas eu lieu sans cela. Mes nouveaux prototypes m’ont aussi aidé à tenir le coup. Tu fais partie du voyage.
Les deux hommes se serrèrent la main.
— Il ne faut pas tarder à emmener tout ce petit monde loin d’ici Hector, dit le docteur Dross. De notre côté nous allons tenter de corriger le tir avec les Bléassenghs, si c’est encore possible.
Bientôt ils entendirent le bruit de l’hélicoptère. Le chef de l’État s’en allait déjà, le Noble à ses côtés. Le bureau fut bientôt empli de monde. Chacun semblait secoué. Hector étreignit Géraldine en silence, leur amour suivrait à n’en pas douter un cours tourmenté mais qui tiendrait la route. Nos marcheurs, à regret, s’apprêtaient à la reprendre, et cette fois ils avaient de la compagnie.
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