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29/01/2014

Pete Seeger, Adieu

12:46 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)

29 janvier

Ce matin, un texte que je viens d'écrire. C'est court, rubrique poésie donc. Il s'intitule Rencontre d'aujoud'hui

 

Rencontre d'aujourd'hui

 

Il aperçoit un groupe de filles discutant à proximité de la vieille prison désaffectée,  s'approche d'elles nonchalemment, sort avec indolence de la poche intérieure de sa veste son Galaxy Team pourvu d'un projecteur intégré, sous Android 2-3 Gingerbread.

 

Les filles, vaguement amusées, regardent se gondoler en plein jour, les images de ce miroir déformant que devient tout à coup le mur crevassé de l'ancienne taule.

 

— À combien la luminosité ?

 

interroge l'une d'elles, elle jauge malicieusement le beau garçon sans cesser de mâcher son chewing-gum.

 

— 15 lumens.

 

— Ouais, c'est chouette, dit-elle, conquise.

 

— Ouais mais non, dit une autre, qui apparemment "la jouerait provoc" selon les copines, pour attirer l'attention du jeune homme. 

 

— Non pourquoi ? nom d'un chien !

 

s'exclame le cinéaste de fortune aussitôt sous tension et intrigué tout de même.

 

— Je connais un autre type qu'a un mobile 15 OS. Son iPhone se transforme en picoproj., crois-moi, il  en jette autrement plus que ton bidule.

 

Il dévisage la fille, ne se démonte pas, décide de relever le défi parce qu'elle lui plait.

 

— J'ai un caméscope à la maison HDRPJ 20, dit-il, qui intègre un picoproj. Chez moi, les murs sont blancs, j'peux te montrer des films de mes derniers voyages. 12 lumens, ça suffit en intérieur, et en prime si tu veux, j'te f'rai essayer mon zoom optique de 27 x. Ça te dit ?

 

La première protagoniste, vexée de n'être pas invitée veut reprendre la main :

 

— Ouais, c'est nul ! mon pote a une tablette  Q U7 , son picoprojecteur est de 35 lumens, qui projette un écran de 60 pouces si tu veux savoir... n'importe où et quand tu veux.

 

Le garçon agacé par l'intervention qu'il trouve inopportune de la part de celle qu'il traite intérieurement de grognasse, se montre dubitatif :

 

— Ah ouais ? Et combien de pixels ?

 

La fille se sait évincée. Elle arbore néanmoins une coquette moue à la Brigitte Bardot et daigne lâcher quelques chiffres :

 

— 854x480. Ouais, je sais, la résolution est loin du HD, mais bon, c'est largement suffisant pour regarder des films et des vidéos s'il fait assez sombre dans la pièce.

 

— Assez sombre dans la pièce ! s'esclaffe le garçon, tu t'es coupée petite ! je préfère ce Galaxy Team tant qu'à faire. C'est juste que j'ai pas trouvé de murs plans. Arrête de te gondoler ! dit-il en s'adressant à sa favorite en train effectivement de rire follement. Entre deux hoquets elle dit :

 

— C'est juste que... il faut toujours des murs, tu vois... des murs plans, des murs blancs. Elle se ressaisit et reprend, ... et plein de supports : tablettes, notebook avec entrée HDMI. C'est  trop de matos en fin de compte, si on y réfléchit ! Autant se payer un bon vieux cinoche comme nos grands-parents !

 

Le garçon, ému, sous le charme de sa nouvelle dulcinée, saisit l'opportunité car il en est sûr, il s'agit bien d'une invitation déguisée.

 

— Ben ouais, bafouille-t-il, c'est juste que, alors, faut que'je t'emmène sur ma moto. Elle est garée pas loin. Il arrête la projection que personne ne regardait, range son smartphone, et continue, ici y'a plus de ciné mais j'en connais un vers Truboulin, à 50 bornes d'ici. On y va ?

 

Les deux s'en vont bras-dessus, bras-dessous, conquis, et comme sous hypnose, ils ont oublié de prendre congé des autres. Les filles regardent partir avec un peu d'envie et de regret le couple qui, à peine formé,  s'éloigne d'elles sans vergogne, à grands pas. Certaines lèvent les yeux au ciel, où passent à grande vitesse des caravanes de nuages blancs, vertigineux comme parfois un virage du destin, elles sentent sur leur visage le souffle d'un vent d'ouest qui s'affirme, décoiffe, soulève et les pousse à quitter les lieux à leur tour. Le mur crevassé reçoit alors leurs ombres fugitives parmi celles toujours dansantes des branches d'arbres voisins, qui font comme des signes au-revoir. 

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

28/01/2014

Note de lecture - M. Ouine de Bernanos

Les personnages se révèlent, oui — nul doute sur l'identité du criminel, que je vous laisse découvrir par vous-même si ce n'est déjà fait — mais de façon détournée ou plutôt, Bernanos n'expose pas plein feux ses personnages aux lecteurs, il ne les donne pas en pâture, pas même M. Ouine ; dans le cas du maire qui se lâche d'un coup, se livre en espérant peut-être se délivrer, se purifier de ses tares, cela passe  par le filtre du langage de l'auteur,  langage qui fait office de lumière tamisée ; les crudités sont mises en sourdine,  le glauque recule, l'auteur s'interpose, on accède ou pas au secret par la porte dérobée des mots de Bernanos. Pas de fausse pudeur, il s'agit je pense de ne pas ajouter à la souffrance et peut-être aussi de ménager le lecteur.

 

Cependant, concernant les quelques personnages cultivés et néanmoins glauques, ou en partie, du roman, ceux-ci passent à leur manière sans cesse aux aveux, mais eux aussi de façon détournée, par le tamis de métaphores ou autre, si bien que le sens des propos de M. Ouine, par exemple, échappe au curé de Fenouille qui baigne dans une innocence sublime, ou à Steeny qui sous l'effet de l'incompréhension se met à sangloter, ou encore, ce sens peut échapper au lecteur impatient qui risque, quel dommage!  d'abandonner le roman.   

 

 

Par contre Bernanos donne  le film, pourrait-on dire, des comportements, où Ginette par exemple se dépouille de toute pudeur en se mettant constamment en scène toute seule. L'auteur, en ce qui la concerne, n'a plus qu'à la filmer avec sa grande jument dont elle n'est pas maître et qui surgit toujours on ne sait d'où ; est-ce une allégorie de la possible dangerosité de Ginette ? Il n'empêche que l'empathie de l'auteur pour cette Ginette-là est sensible. La grande jument entre donc en scène tel un personnage de dessin animé, souvent dans un halo de lumière aveuglant,  le spectateur l'espace de quelques secondes devient un auditeur, il n'entend plus que les trépignements de la jument folle avant que ne lui apparaisse la grande culbute de Ginette que sa jument choisit d'envoyer dinguer à tous les diables à la moindre occasion de la donner en ridicule au premier badaud venu, lequel risque aussi de valdinguer dans le fossé par la même occasion.

 

Que dire du curé qui s'étale de tout son long dans la boue ?  Bernanos ne veut pas rendre ses héros grotesques, il les aime ces personnages, c'est évident, pourtant, alors que "le vieux" lui devient de plus en plus sympathique, l'auteur s'empresse dirait-on, de le montrer courant soudainement de façon ridicule,  lâche d'un coup, sous les regards haineux des villageois rassemblés.  Faut-il comprendre que par ce biais Bernanos veut signifier la force maléfique du groupe sur toute personne qu'il a prise en otage ? De la solitude christique face au mal à un moment donné, en d'autres mots, du terrassement fatidique d'un homme isolé, telle une proie, sous l'hostilité d'un groupe ennemi ? Je pense que oui.    

08:29 Publié dans Note | Lien permanent | Commentaires (0)