19/05/2021
le critique apprécie, la critique dans son ensemble apprécie ♣♣♣ Ligne de tête, ligne de cœur, ligne de vie
Apprécie qui ?
Un nommé Jeffrey Eugénides.
Voilà entre autre, par exemple, au sujet d'un livre dont il est l'auteur intitulé Des raisons de se plaindre, une critique de Télérama :
"Sur une île tropicale, Mitchell contracte une dysenterie amibienne et découvre le sens de l'existence. Sous les yeux de son ancien amant, Tomasina cherche désespérément un donneur de sperme. Ces dix nouvelles mettent en scène des personnages terriblement humains. On côtoie leurs petites lâchetés, leurs soucis de cœur ou d'argent, leurs maladresses. L'humour les rachète. Ils nous ressemblent.
Né en 1960, Jeffrey Eugenides vit à Princeton (New Jersey). Son premier roman, Virgin Suicides, a été adapté au cinéma par Sofia Coppola. Middlesex, récompensé par le prix Pulitzer, ainsi que Le Roman du mariage ont connu un immense succès public et critique. Tous sont disponibles en Points.
" Des portraits graves et émouvants, reflets de nos solitudes modernes. ""
Télérama
Un petit reproche pour le critique : apprécier quelqu'un parce qu'il nous ressemblerait serait un peu léger comme critère, voire un peu lourd. On se prendrait pour la référence ultime ou encore on suivrait un processus de pensée du genre de celui-ci : puisque je me pardonne ces failles que je reconnais en moi également, je te les pardonne etc. Mais on est sûrement capable de bienveillance ou mieux encore, de compétence pour apporter si nécessaire de l'aide alors qu'on est étranger au problème intime à quoi l'autre est confronté. Il faut l'espérer. L'autre ne me ressemble pas dans ce à quoi il est confronté, je ne marche pas pour le moment dans ses mocassins, mais je ne le condamne pas pour autant. Etre capable de cela, ce serait bien. Ce serait sûrement aussi être sur le chemin de la sainteté, à mes yeux.
Cela dit, j'ai apprécié les nouvelles d'Eugénides Jeffrey moi aussi. Il m'a bousculée.
Parmi ces nouvelles, l'histoire d'une jeune fille qui émeut un gynécologue. Le professionnel hétérosexuel avait toujours su rester froid lors d'auscultations gynécologiques de ses clientes, et le voilà troublé devant la personnalité délicieusement féminine à ses yeux de l'une d'elle : timide, gracieuse, pudique et belle. Le gynéco a du mal à ne pas tomber amoureux. Or il découvre que si cette jeune fille amenée chez lui par ses parents inquiets souffre tant physiquement, c'est parce que sa verge n'est pas sortie et commence à être trop comprimée dans la cavité où elle est encore enfermée. La jeune fille est profondément féminine dans l'âme, or d'aucuns vont lui demander d'assumer son sexe.... et donc une masculinité totalement inexistante dans son psychisme. Tout ne serait donc pas que physique, nous dit l'auteur.
Ce personnage ne ressemble à personne que je connaisse dans mon entourage mais j'ai compris la détresse que peut éprouver la personne à qui cela peut arriver.
L'espace d'un instant, le lecteur attentif et la lectrice attentive se mettent dans les mocassins de celui ou celle à qui arrive cet avatar. Et on sent sa capacité d'aimer s'agrandir.
Il y a plus d'espace qu'avant cette lecture en soi. On pourrait même écrire à notre tour, se laisser habiter par des personnages l'espace d'un moment, comme si on les rejoignait.
On rompt dans l'absolu l'isolement de tel ou telle, venu.e à soi par le travail d'un auteur.e., lors de la lecture d'un ouvrage, ou par la méditation, si c'est soi qui écrit.
J'ai lu ces nouvelles il y a quelques années déjà, certaines m'ont marquée (genre "tatouée de l'intérieur") plus que d'autres. Notamment celle dont je viens de parler.
♦♣♣
Et ligne de force !
C'est ici :
10:48 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0)
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