26/04/2012
Aventure nocturne
Une grande femme debout immobile au fond du patio, qu’est-ce qu’elle fait là ? Elle finit par entrer dans la maison, l’air un peu paumé. Je suis assez interloquée mais elle me parle normalement, n’a pas l’air dangereuse. Tout compte fait, je lui propose un café. Elle accepte, monte à l’étage, je la trouve un peu sans gêne malgré tout. Patrick me parle dans les escaliers, je lui fais signe qu’une inconnue se tient derrière lui, là-haut, dans l’entrebâillement de la porte de son bureau et l‘observe, elle le surplombe de la hauteur de quelques marches. Je voudrais lui dire de faire attention tout de même, ce n’est pas sûr qu’elle soit complètement inoffensive. L’ambiance s’améliore quand j’apprends de la bouche même de la nouvelle venue qu’elle est violoncelliste et s’est tout simplement perdue en voulant prendre un raccourci pour se rendre aux studios de France Inter pour une interview. Coïncidence heureuse, l'immeuble où se trouvent les locaux de cette radio est sur le chemin de l'école de Sam et c‘est l‘heure qu‘il s’y rende. Cartable sur le dos il s‘en va tout souriant, la femme se met en devoir de le suivre et arrive ainsi à bon port, un vieil homme l’attendait, un peu inquiet de son retard. Bienveillant, heureux de la voir, il la questionne sans tarder. Elle devient alors une sorte d’Alice au pays des merveilles, initiée par un maître qui lui fait découvrir différentes facettes du monde environnant. De mon côté c’est la détente, je regarde la photo de la musicienne dans le journal, en compagnie de son partenaire musical. C‘est bien elle dans ce grand imper, les cheveux longs raides et emmêlés, un peu hirsute. Je me réveille à demi et me fait cette réflexion que cette femme est assez amusante même si sur le coup son air de rôdeuse maladive m’avait un peu effrayée. Quand j’ai fait ce rêve j’avais éteint depuis peu la radio, la violoncelliste Noémi Boutin et le guitariste Marc Ducret y parlaient de leur musique. Un peu plus tôt encore j’avais vu le voisin vaquer dans son patio avec des airs forcément bizarres en raison de l’exiguïté des lieux.
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24/04/2012
"Trop tard" dit-elle
Où est passée cette femme à la figure un peu violacée à force de boire, cette femme à qui elle avait proposé un kilo de pommes et du pain et qui lui avait répondu que ça faisait longtemps qu’elle ne mangeait plus de fruits et qu’il était trop tard pour s’y remettre, qu’elle avait juste besoin d’un canon. — Au moins vous, lui avait répondu la grosse dame, vous n’avez pas de problème de surpoids.
— Non, avait-elle répondu l’air chagrin et indifférent, si vous pouvez me donner un ou deux euros, ça ira. »
L’autre avait rangé ses pommes dans le coffre de sa voiture, et cherché ensuite dans son porte-monnaie, comme à regret, les euros demandés. L’unique moment où elle voyait des gens était celui des courses mais pas moyen de rencontrer quelqu’un de réceptif, chacun était dans sa bulle, à lutter contre la crise cardiaque du trop plein pour les consommateurs habitués des lieux, ou le malaise fatal dû aux carences alimentaires concernant les clochards qui traînaient dans le coin. Aujourd’hui elle constatait que cette femme au jean déchiré par l’usure, à force d’être porté de jour et de nuit par la rôdeuse, elle ne l’avait pas vu depuis un certain temps. Pas besoin d’être devin pour imaginer ce qui lui était probablement arrivé. Elle avait succombé à une cuite, son corps à la fois menu et bouffi avait peut-être été repéré au petit matin par les éboueurs et emporté ensuite en catimini à la morgue la plus proche, où l’on avait décidé — peut-être — dans le cynisme ambiant, qu’il servirait enfin à quelque chose comme faire avancer la science si tant est que la chose restât exploitable encore. Elle aurait aimé la voir apparaître cette femme à l’air bougon, qui aurait pu être jolie, lui dire qu’un sourire sincère fait de n’importe qui une personne, quelqu’un. Ces petits riens qui donnent des petits coups d’aiguille aux bulles et aux choses, il aurait fallu les sentir. On aurait pu s’asseoir ensemble un moment, et faire silence, laisser passer les anges.
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23/04/2012
à gauche toute
Odette effectuait un travail de surveillance qui bientôt ne serait plus reconnu par l‘état et donc plus payé, c’était passé dans le dernier décret. Heureusement que Jules allait lui confier son pit-bull à promener trois fois par semaine. Activité reconnue entre toutes et bien payée depuis que le président, ami des animaux, avait été réélu. Personne n’aurait pu imaginer pareille aventure ! La disparition de certains boulots, décrétés inutiles du jour au lendemain et la création d’autres, aussi futiles que promeneurs de chiens et pas assez nombreux pour compenser la perte des autres emplois. De plus, beaucoup de gens étranges traînaient dans la rue depuis deux semaines déjà, où l’hôpital psychiatrique de la ville avait été vandalisé par les gueux. Il y avait eu une sorte de volonté de prise de la Bastille de la part des révoltés qui avaient décidé de s‘attaquer à cette institution, mais les derniers journalistes qui restaient encore en place avaient témoigné que c’était en réalité comme si ces malheureux avaient enfoncé des portes ouvertes et la déroute avait été totale. Une occasion en or pour le président de se débarrasser des derniers psychiatres en place qui seraient bientôt remplacés par des matons car il avait depuis longtemps la secrète intention de transformer l’hôpital en prison. Maintenant on ne savait plus si c’était des malades ou des nouveaux chômeurs, que l’on devait désormais appeler « gens sans emploi validé », qui traînaient désœuvrés dans les rues de la ville. "Ouais se dit Odette il y a eu l’affaire Chonrac et ses emplois fictifs, ce doit être une vengeance de son héritier politique qui vient de repasser président aux dernières élections. Ce que ça peut-être mesquin, rancunier, extrêmes, ces gens de droite. Ah si Troland était passé on n’en serait pas là à l’heure qu’il est."
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