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12/10/2020

Yoko

Yoko était physique. Il aimait me cramponner, faire son pot de colle et j'aimais cela, je le gardais sur mes jambes, m'efforçant de rester immobile le plus longtemps possible pour ne pas le déranger.

Le soir, il se mettait sur ma hanche et attendait que je m'endorme.

Il ne supportait vraiment que deux humains : mon ami et moi-même et se cachait lorsqu'on recevait de la visite. Sauf une fois, où il commençait à s'habituer à la présence de Véronique.

 

Dès que ses habitudes étaient bousculées, il n'était plus lui-même et pouvait devenir comme sauvage, ne reconnaissant plus personne. Il était ainsi quand nous l'emmenions chez le vétérinaire. Miaulant de toutes ses forces dans la voiture, à un volume voisin d'une sirène de police.

 

Lorsque Tigret a eu son cancer, le pauvre animal pourrissait littéralement sur pied et j'avais beau changer son pansement très souvent, le beau Tigret sentait mauvais. Yoko, après être resté sur moi un certain temps devait me quitter, car je l'y obligeais, ne serait-ce que pour travailler. Alors, cancer ou pas, il allait dormir tout contre Tigret. Quand Tigret est mort, Yoko s'est isolé plus ou moins. Il a passé le plus clair d'un été dans un fauteuil près de la fenêtre. Du coup, il n'était plus pot de colle. Il cuvait la perte de Tigret. Il a toujours gardé ses distances avec Nono, mais je pense qu'il l'aimait beaucoup.

 

Vers treize heures aujourd'hui, Yoko qui était redevenu un "chat collant" depuis quelque temps (et j'appréciais le sentir sur moi plus souvent, comme à l'époque d'avant la mort de Tigret), vers treize heures donc Yoko a tressailli, plein de soubresauts.

 

Je suis partie en courant vers la cuisine, je ne pouvais pas faire face d'emblée à une agonie violente. Heureusement mon ami l'a pris dans ses bras, l'a amené à la soucoupe d'eau car il croyait qu'il avait avalé de travers. Yoko n'a pas bu, s'est dirigé vers l'escalier où les soubresauts l'ont repris. Il ressemblait à un chat que l'on électrocute et il miaulait de véritables appels au secours. Vers quatorze heures  le vétérinaire a constaté qu'il s'agissait d'une atteinte neurologique grave, extrême. Yoko, le regard vitreux miaulait sans discontinuer de façon stridente, ses appels à l'aide. Il ne tenait plus sur ses pattes, raides, il était aplati au sol comme s'il s'accrochait à une planche en pleine mer démontée. Le vétérinaire l'a calmé sur le champ avec une piqûre et a abrégé définitivement ses souffrances. Yoko avait seize ans, trois mois et quelques jours . Il ne chassait pas, il était émotif à l'extrême mais heureux d'être avec nous. Nous l'avons enterré dans un lieu qu'il aimait, près de la rivière.

 

La dernière image que j'ai de lui, c'est  le dessus de sa tête, légèrement penchée, ses deux oreilles pointant bien droit. Le silence, la paix, le sommeil de Yoko pour longtemps dans la sécurité dont il avait tant besoin pour être lui-même. On peut dire un grand merci au vétérinaire qui l'a soulagé. À peine la piqure faite, Yoko s'endormait.

 

Il reste Nono, qui semble avoir tout compris et nous l'a fait sentir. Elle a constaté l'absence de Yoko dans la caisse, n'a d'abord pas voulu rentrer dans la maison, a finalement accepté de rentrer. S'est mise sur son coussin mais en nous tournant le dos. Ce qu'elle ne fait jamais. Quand elle a bien voulu faire face, elle gardait plantés ses yeux dans les miens.

Je lui ai dit "Yoko est parti." Elle a cillé comme pour dire "oui, je sais" ; j'ai ajouté "il n'est pas loin. Il est à côté de la rivière. Tu le sais ?", elle a cillé de nouveau. Peu de temps après elle venait faire un câlin sur nous, l'un après l'autre, pour nous manifester sa confiance et elle est repartie sur son coussin, s'y positionnant de façon à ne plus nous tourner le dos.

 

Yoko, comme j'aimais t'appeler en modulant ton nom de diverses façons comiques, pour te faire rire. Voilà je pleure mon amour. 

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