Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

18/03/2019

L'expérience en poésie

 

Jeunesse

Smelling of sweet resin the Aleppo pines’

shadows grow taller by the hour.

 

Les ombres des pins d'Alep grandissent au fil des heures, parfumées de résine douce.

 

Des jumeaux identiques se poursuivent l'un l'autre parmi les ombres,

le plus vieux de dix minutes criant,

Je vais te tuer, tandis que le plus jeune

rit, Tue-moi si tu le peux !

Jour après jour ces mortiers à l'heure du thé

ne cessent de cribler le mur pare-souffle auquel

les garçons sont tellement habitués qu'ils continuent de jouer.

 

Two identical

twin boys chase each other through the shadows,

the one who’s ten minutes older yelling,

I’m gonna kill you while the younger one

laughs, Kill me, kill me if you can!

Day by day these teatime mortars

keep pecking at the blast wall that the boys

have grown so used to they keep right on playing.

 

 

If they weren’t here in front of me, I’d find them

hard to imagine, just as I sometimes find

my own twin brother hard to imagine.

 

S'ils n'étaient pas ici devant moi, je les trouverais

difficiles à imaginer, tout comme je trouve parfois

mon propre jumeau inimaginable.

 

 

 

 

I’m supposed to be doing a story

on soldiers, what they do to keep from

being frightened, but all I can think about

is how Tim would chase me or I’d chase him

and we’d yell, Im gonna kill you, just like

these brothers do, so alive in their bodies,

just as Tim who is so alive will one day not be:

will it be me or him who first dies?

 

Je suis censé mener une enquête sur des soldats,

ce qu'ils font pour ne pas avoir peur,

mais tout ce à quoi je peux penser, c'est comment Tim me poursuivrait ou comment je le poursuivrais

et nous crierions, je vais te tuer.

Tout comme le font ces frères si vivants dans leur corps,

tout comme Tim, qui est si vivant, ne le sera pas un jour : qui des deux mourra le premier, lui ou moi ?

 

 

 

But I came here to do a story on soldiers

and how they keep watching out for death

and manage to fight and die without going crazy —

 

Mais je suis venu ici pour faire une enquête sur des soldats

comment ils suivent de près la mort

et réussissent à se battre et à mourir sans devenir fou —

 

les garçons s'accroupissent et regardent les fourmis grimper

le long de l'écorce craquelée, les antennes vacillantes

tapant l'arbre de haut en bas

cela me rappelle le soldat de l'autre côté des baraquements

toujours introverti, nerveux,

tandis que ses yeux scrutent quelque chose que je ne vois pas —

 

the boys squat down to look at ants climbing

through corrugated bark, the wavering antennae

tapping up and down the tree reminding me

of the soldier across the barracks sitting

still inside himself, listening to his nerves

while his eyes peer out at something I can’t see—

 

 

when Achilles’ immortal mother came

to her grieving son, knowing he would soon

die, and gave him his armor and kept the worms

from the wounds of his dead friend, Patroclus, she,

a goddess, knew she wouldn’t be allowed

to keep those same worms from her son’s body.

 

lorsque la mère immortelle d’Achille

est venue vers son fils endeuillé, sachant qu’il mourrait bientôt,

lui remettre son armure, et a éloigné les vers

des plaies de son ami mort, Patrocle, elle,

une déesse, savait qu'elle ne serait pas autorisée

à éloigner ces mêmes vers du corps de son fils.
 

 

I know I’m not his father, he’s not my son,

but he looks so young, young enough to be

my son—sitting on his bunk, watching out for death,

trying to fight and die without going crazy, he

reaches for his rifle, breaks it down,

dust cover, spring, bolt carrier with piston,

wiping it all down with a rag and oil,

cleaning it for the second time this hour

as shadows shifting through the pines

bury him and the little boys and Tim

and me in non-metaphorical, real life darkness

where I’m supposed to be doing a story.

 

Je sais que je ne suis pas son père, il n'est pas mon fils,

mais il paraît si jeune, suffisamment jeune pour être mon fils

— assis sur sa couchette, guettant la mort,

essayant de se battre et de mourir sans devenir fou,

il prend son fusil, le démonte,

la housse de protection, le ressort,

la chambre le verrou et le piston,

l'essuyant tout du long avec un chiffon et de l'huile,

le nettoyant pour la seconde fois en une heure

tandis que les ombres changent sous les pins

l'ensevelissant lui et les petits garçons et Tim

et moi dans les non métaphoriques,

ténèbres de la vie réelle

où je suis censé faire une enquête.

 

 

 

Tom Sleigh  ; Youth ; sur le site Poem a day

 

La prière de Roger :

 

http://rogerreflexions.hautetfort.com/

Les commentaires sont fermés.