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16/09/2014

La veillée

La veillée d'hier soir se passa en compagnie du livre de Paul Féval ;  je fis de beaux rêves ensuite. Ne vous en parlerai pas, ils ne présentaient pas un caractère qui pût intéresser quelqu'un d'autre que moi, mais je mets en partage ici un extrait de Maman Léo (Léocadie Samayoux) ;  voici un aperçu du style de Féval que je considère comme un  écrivain tonique ...  après trente pages de lecture de Maman Léo (dompteuse de profession, du vieux lion invalide, et patronne du cirque où travaille Échalot).  Lequel, père adoptif du bébé Saladin à qui il a fabriqué une prothèse afin de le faire passer pour un hydrocéphale à exposer en foire, fait une pause une fois cette prothèse terminée et l'essayage sur l'enfant concluant :

 

" Ici sa voix s'adoucit jusqu'au murmure, et il glissa un regard attendri vers Mme Samayoux, qui ronflait bruyamment.

— Voilà les mystères du cœur humain ! pensa-t-il tout haut. Quand Saladin a bien pleuré, il s'endort ; et c'est de même chez les dames. Il n'y a pas d'âge ni de sexe qui tienne, faut que les enfants d'Adam se font du chagrin à soi-mêmes, quand les circonstances ne s'y prêtent pas. Y aurait-il un poisson dans l'eau plus heureux que la patronne, si elle n'avait pas l'inconvénient de cette passion-là !

 

Il s'approcha de la table sur la pointe du pied.

Il tenait d'une main son invention, de l'autre un vieux pinceau, déplumé, abandonné au rebut par un des apprentis de l'atelier Cœur d'Acier.

 

Mais ces objets ne faisaient qu'ajouter à l'expressive émotion de son geste, pendant qu'il contemplait, avec une admiration poussée jusqu'à la ferveur, le dos de Mme Samayoux.

 

Celle-ci avait laissé tomber une de ses mains ; comme sa tête restait appuyée sur l'autre main, on voyait le profil perdu de sa face rubiconde et chargée d'embonpoint. Ses cheveux très abondants, mais qui grisonnaient par place, s'échappaient de son madras aux nuances violentes, qui n'était pas de la plus entière fraîcheur.

 

Bien des gens vous diraient qu'à quarante ans passés, un jeune homme, pour employer les expressions d'Échalot quand il parlait de lui-même, ne peut plus avoir les sentiments d'un page.

 

D'autres pourraient penser que Léocadie Samayoux ne réalisait pas exactement l'idée qu'on se fait d'une châtelaine.

 

Et pourtant, je ne vois rien, en dehors des comparaisons chevaleresques, qui puisse donner une idée du culte respectueux, mais ardent, payé par ce pauvre diable à cette grosse bonne femme.

 

Malgré mon habitude de tout dire, j'hésiterais à exprimer là-dessus mon opinion, si elle n'était aussi sincère que mélancolique.

 

La voici :

 

En notre siècle si avisé, peut-être est-il nécessaire de plonger à ces profondeurs pour trouver un dernier vestige de ces niaiseries sublimes qu'on appelait les choses chevaleresques."

 

Paul Féval

 

Va s'ensuivre une déclaration d'amour d'Échalot à sa patronne, Maman Léo, qui tient de la ferveur d'un Don Quichotte envers sa dulcinée du Toboso. Vous la mettrai demain, en partage sur ce blog. 

 

 

 

 

 

 

 

    

 

 

 

 

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