04/07/2012
Les Marcheurs - Retrouvailles retardées
— Un robot-voiture va arriver, il va les ramener à Bléassengh. Nous allons rendre à Le Noble ses hommes de main. Un autre, direction La Corne d’abondance va venir vous rechercher tous les deux. Jeudi ne devrait pas tarder lui aussi à rentrer en voiture téléprogrammée. Là-bas la police-robot de Bléassengh a neutralisé les habitants agressifs en même temps que ceux-là qui nous auront servi de sirène d’alarme. Jeudi a été libéré par la même occasion. J’ai réussi à le joindre par chien interposé pendant que Dora vous parlait. À propos des Bléassengh, je n’aurai pas cru devoir en arriver là. Il faut croire que nous les aimions un peu ces démons, jusqu’au bout nous avons espéré un changement de leur part…
Dora répondit d’une voix émue
— Nous ne serons jamais assez sentimentaux…
Le docteur Dross conseilla à Dora qui venait d'entrer en conversation avec lui de ne pas se mettre tout de suite en contact avec Jeudi via l’un des chiens robots qui encerclaient ses ennemis.
— Je ne vous conseille pas de lui parler maintenant Dora, il a reçu une flèche accidentellement, il pleure, il soupire sans cesse, et il délire de temps à autre en raison du choc des dernières heures vécues avec les Bléassengh. Il vaudrait mieux le laisser tranquille jusqu’à demain.
— Merci de m’avoir prévenu Charles. Je connais les effets de cette drogue, je saurai faire la part des choses.
Là-dessus Dora se connecta au réseau de Bléassengh
— Tu m’entends Jeudi ? J’étais tellement inquiète !
Jeudi se taisait, essayait de reprendre son souffle, reniflait, elle l’entendit soudain parler à Madame Piéaumur, qu'elle put voir grâce à la caméra incorporée, recroquevillée dans un coin de la pièce où trônait un bureau massif en haut d'une estrade assez monumentale.
— Au fond, vous avez gagné Madame Piéaumur, je suis devenu comme vous, je n’éprouve d’empathie pour aucun de vos enfants que vous exhibez si fièrement et ça me rend très mal. Je voudrais retourner quelque part où je pourrais éprouver de nouveau de l’empathie parce que vivre comme vous, de la haine de l’autre, moi je ne pourrais pas. C’est tout simplement impossible pour moi. Je préfèrerais le suicide. Je ne sais pas comment vous faites. Ouais, nous sommes radicalement différents, c'est bien ce que je disais.
Le docteur Dross, gêné tenta une intervention :
— C’est la drogue qui vous rend triste Jeudi. Pleurez et taisez vous. Dora vous entend.
— Toi le chien ferme ta gueule. Je suis comme le saint Maçon des Râteaux libres, je ne crois que ce que je vois. Et je ne pense pas que dans ce clébard, il y ait mon ami Dross, pas plus que dans celui-là, il y ait Dora. Dora, je l’ai perdue. Je les ai perdus mes amis et en les perdant j’ai trouvé Piéaumur et sa clique. Sa clique qui me faisait un procès truqué, à la va-vite comme d'hab. et m’envoyait pour la seconde fois à la potence. Je pense, clébards, que vous faites partie du jeu sadique de ces salauds. Un de leurs mauvais jeux avant mon exécution et je voudrais dire à ces pleurnichards aux larmes de crocodiles qu’ils ont gagné. Effectivement, parce que leurs enfants me débectent aussi. Je suis devenu aussi mauvais qu’eux et de ce fait, je ne crois pas en l’innocence, pas même en celle des mioches. Avant j’étais candide, j’aimais, je respirais. J’ai accueilli Dora comme un cadeau du ciel. Mais elle n’était qu’un rêve et vous Piéaumur, ma semblable, vous êtes la réalité.
Un chien ouvrit tout grand sa gueule, et Dora se fit entendre :
— C’est la drogue qui te fait cet effet Jeudi. Patiente un peu. Tu reconnais ma voix tout de même.
Cela ne fit qu'exaspérer Jeudi.
— Vous êtes allé jusqu’à lui piquer sa voix mes salauds, s'exclama-t-il, grandiloquent. C’est comme si vous lui voliez son âme. Cessez cette comédie, qu’on en finisse, achevez-moi.
Autour de lui Madame Piaumur et monsieur Todi, le visage dans les mains pleuraient silencieusement sans discontinuer, parfois à gros sanglots mal étouffés. Dora s’adressa à Dross :
— ça va faire effet combien de temps cette drogue ?
— Le temps de lui administrer un contre-poison, pour les autres ça va durer quelques jours, le temps de recompartimenter l’hôpital en plusieurs fusées et de mettre les voiles. Si l’État trouve trace de cet engin sptial, nous pourrions apporter de l’eau au moulin de Le Noble.
Dora maugréa :
— Adieu la zone verte alors, nous abdiquons, Le Noble a réussi de toute façon à nous faire partir.
Jeudi avait suivi la conversation, il se recroquevilla avant de déclarer :
— Oui méchant chien, le chien méchant a raison, adieu l’amour, ce n’était qu’un rêve. Je suis piqué. frère chien, mon semblable, tu m‘as piqué.
Dora exaspérée soupira « quelles retrouvailles ! De bons somnifères auraient fait mieux l’affaire ! »
— Non l'amie, cette drogue est plus douce, rétorqua le docteur Dross. C’est une question d’éthique. Patientez bon sang ! Vous le retrouverez bientôt votre compagnon, allez.
07:55 Publié dans Texte à suivre | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.