04/06/2012
Heure cruciale... Les Marcheurs
La porte de la chambre s’entrouvrit, Tom se dirigea vers le lit, l’air préoccupé, Jeudi se faisait trop attendre et le désespoir mal contenu de Dora déclenchait sa propre sirène.
— Ils sont encore en pourparlers et toujours pas de Jeudi à l’horizon. La situation est plus grave que je ne pensais, les gens de Bléassengh peuvent être très agressifs envers les vagabonds non répertoriés que nous sommes pour eux. Quelle absurdité ! Tu as entendu ? Ils pensent s’en aller en réalité, si cela tourne mal. Notre présence ici empire les choses, je le sens. Je n’ai pas toutes les données du problème, certaines choses m’échappent, mais je le sens.
— L’hôpital est en danger ?
— J’ai comme l’impression que c’est le cœur du problème pour ceux de la ville. Je ne suis pas certain que notre fameuse équipe de savants hors pair ait reçu une permission de construire, ils peuvent même être accusés de détournement de bien public par le Conseil général que préside un certain Monsieur Todi, s’il décide de leur faire la guerre. Cet hôpital serait une sorte de chef-d’œuvre clandestin que cela ne m’étonnerait pas. Ils disent tout à demi-mot, tout le temps.
— Si tu ne t’es pas trompé, ça aura été de courtes vacances pour Peter et nous.
— Viens Odette, j’ai une idée qui me trotte dans la tête.
Sans mot dire elle suivit son vieil ami qui la conduisit vers un escalier grinçant au bout duquel, après un corridor au plancher usé se trouvait la porte ultime de la grande maison, porte dont l’entrebâillement même exprimait l’attente. Tom sentit le contact froid du métal de la clenche il dénotait une glaciale impatience face à l‘oubli. Ils furent étonnés de l’aspect qu’offrait ce grenier, il évoquait un magasin abandonné depuis peu, qu’une gérante aurait quitté à regret, prise au dépourvu par des événements inattendus. Tom appela, sur le ton d’une plainte craintive « Il y a quelqu’un ? », Odette quant à elle se sentit rassurée à la vue de ces rangées d’habits mis sur cintres, lesquels étaient accrochés tout le long des barres métalliques qui formaient des rayons, à la vue aussi des chapeaux posés sur des étagères en surplomb, et rassérénée, elle attendait une réponse positive, celle de Dora ou de la belle Géraldine qui devaient souvent hanter ces lieux prodigues pensa-t-elle. Ces amies de longue date n’étaient pas que des scientifiques mais des femmes amoureuses aussi, elles devaient avoir créé ce lieu pour elles toutes. Personne ne répondant, elle s’extasia devant des perruques posées en prolongement des chapeaux sur d’autres étagères. Non, décidément, la Corne d’abondance ne pouvait leur faire faux bond, et les loups les protègeraient de la présence des gens de la ville. Elle visa une perruque rousse, qu’elle trouva assez cocasse, et pour dérider Tom grimpa sur un escabeau qui se trouvait là, s’en empara et se la mit sur la tête. Toujours perchée en haut de l’escabeau, elle remarqua ensuite un présentoir à lunettes bien achalandé, elle descendit prestement les marches à la manière d’une gamine à la chasse aux trésors et choisit la paire de lunettes la plus déjantée à son goût. Il s’agissait de grandes lunettes rondes dont la monture était rouge orangée. Un miroir sur pied ne manquait pas à la panoplie du parfait magasin de prêt à porter et lui renvoya l’image d’une personne plutôt jeune.
— Étonnant s’exclama-t-elle, je voulais te faire rire et finalement je me plais bien comme cela ! J’ai minci avec cette marche forcée ! C’est chouette non ?
— C’est parfait ! C’est la coupe qui te va… la couleur te va aussi et les lunettes te donnent un air intello pas du tout clownesque. C’est inespéré !
Odette dans cet instant de bonheur enfantin fit mine de prendre la mouche.
— Merci ! dit-elle tout à la satisfaction de sa découverte : elle venait par la magie d’accessoires assez simple de quitter une vieille peau de chagrin.
— Je voulais dire inespéré, reprit Tom, dans le sens où nous allons pouvoir aller incognito à Bléassengh. Aide-moi à trouver un accoutrement qui m’aille.
Un « Ah » sec tomba platement, qui signifiait qu’Odette était revenue à la réalité.
— Il faut faire vite dit Tom. Il faut nous joindre aux gueux. Si les sirènes retentissent les savants et les gens de l’hôpital pourront quitter les lieux à temps, ils ont des points de chute partout dans le monde. Ils emmèneront Peter. Mais tu peux rester avec eux si tu veux, je ne t’oblige pas à m’accompagner.
— L’union fait la force, je pars avec toi. N’oublions pas nos brouilleurs d’ondes … vivement Jeudi …
Mais aucune plaisanterie n’effleurait Tom en cette heure cruciale.
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11:02 Publié dans Texte à suivre | Lien permanent | Commentaires (0)
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