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10/10/2007

Reggiani

 Avant d'écouter Reggiani : Rapport entre poésie et enfance

Là encore, les poètes sont les premiers à pressentir un lien difficile à définir, et d’abord Baudelaire qui affirme : « Le génie est l’enfance retrouvée à volonté. » Dans son livre sur La poésie et ses environs, le poète contemporain Georges-Emmanuel Clancier, après avoir cité Tristan Corbière :

Il fait noir, enfant, voleur d’étincelles,

Fait ce commentaire :

« Le poète est cet enfant, cet homme qui plonge dans sa nuit intérieure, y redevient pareil à l’enfant qu’il a été, naïf, émerveillé, à peine encore séparé du monde et de ses mystères, et il tente cette aventure spirituelle pour dérober, au cœur de la nuit (là où la raison avoue son impuissance, là où règnent les secrets des rêves), sinon le feu total de la connaissance, du moins des fragments, des étincelles de ce foyer, de ce cœur ardent de la vie. »

(G-E. Clancier, La poésie et ses environs, Gallimard)

L’enfance est liée à la poésie par le statut qu’y revêt le langage. C’est le moment de l’apprentissage des signifiants, le moment où les mots sont encore presque des choses en eux-mêmes, où ils sont attachés, lorsqu’ils émergent un à un, à des affects, des éclairages, des connotations qui les font apparaître sous un jour que l’habitude, le polissage de l’emploi quotidien refouleront : être trop conscient de toutes les aspérités, de toutes les beautés de la forme pourrait être parfois gênant dans le langage usuel, comme si l’on se mettait à sentir tous les efforts du corps pour tenir en équilibre quand on marche. C’est le moment où l’on joue avec ces signifiants, où on les retourne dans tous les sens, où on les prend en bloc pour la plus grande joie des adultes, où les jeux avec les mots deviennent des mots d’enfant.

Or la poésie, en particulier telle qu’elle est pratiquée depuis un siècle, libère ce savoir refoulé, le goût ludique d’aller de mot en mot, goût qui a de fait toujours été celui des poètes, et qui, avec, mais aussi par-delà l’exactitude du dire, d’un usage qui peut être savant, relève d’une vérité profonde : celle du premier contact avec le langage, du premier plaisir qu’il a procuré (pêle-mêle, plaisir de prononcer, d’énoncer, de maîtriser).

Cet intérêt ludique pour le langage amène l’enfant de son côté à rencontrer volontiers la poésie, aussi bien dans les comptines, rondes, etc., qui relèvent de la poésie dite « enfantine », que dans l’apprentissage et la récitation de poèmes plus difficiles, dont chacun sait d’expérience qu’on ne les oublie ensuite jamais.

C’est cet intérêt qui ne disparaît d’ailleurs pas, en principe, avec l’enfance, mais qui peut être emporté par le mécanisme du refoulement des pulsions, et ce qui relève du poétique est alors ressenti comme gênant, à la limite impudique, et cependant, cet investissement des pulsions dans le langage reste puissant pour toute la vie.

Michèle Aquien, Dictionnaire de poétique, p. 21

Demain, je mettrai en ligne Rapport entre rêve et poésie 

Serge Reggiani, je l’écoute depuis toujours, mais c’est son fils que j’ai vu sur scène, un jour de vacances à Berck-sur-Mer. Je l’avais beaucoup apprécié lui aussi. Je vous propose d'écouter Ce soir, mon enfant de Serge Reggiani. 

Le Pont Mirabeau, de Guillaume Apollinaire. 

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