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16/09/2007

Réflexion

À la question de Martin Legros : l’identité nationale est-elle en danger aujourd’hui, Paul Thibaud, philosophe, ancien directeur de la revue Esprit a répondu :

"Naguère, le grand danger était la fermeture sur soi des nations, leurs passions et préjugés hostiles. La situation actuelle les montre, au contraire, peinant à maîtriser une hétérogénéité et une ouverture nouvelle. L’immigration ne débouche plus sur l’adaptation des arrivants imposée par un milieu compact. L’effectivité nouvelle du droit international, les stratégies des migrants, la fréquence des communications, la fin des empires coloniaux…ont changé la position des « sociétés d’accueil ». Les instruments pour réaliser l’intégration (école, entreprise, quartier, etc) se sont affaiblis. Dire que, dans ces conditions, une politique n’est pas nécessaire pour maintenir l’intercompréhension, la sympathie de voisinage, la possibilité de s’engager ensemble qui caractérisent le civisme, cela n’est possible que si l’on pense que les nations sont un résidu archaïque, donc que l’humanité est à la veille de se fondre dans une indistinction bienheureuse qui serait la fin de l’histoire. Voilà donc l’enjeu : fin ou continuation de l’histoire."

Suite et fin de l’entretien :

Parler d’identité nationale, n’est-ce pas réduire la nation à une forme de communautarisme ?

"Les nations ne sont pas des communautés closes mais des réalités historiques, artificielles, volontaires. Cependant, elles se réfèrent à une origine et une identité communes. « Nos ancêtres les Gaulois » était une formule suggestive à cet égard : elle signifiait aux Bretons aussi bien qu’aux Africains qu’ils pouvaient s’inscrire dans une histoire dont le commencement mythique est fixé à Vercingétorix. Qu’il n’y ait là guère d’ethnicité, la latinité de la langue suffit à le montrer. Au fond, la meilleure formule sur la nation est à tirer de la première phrase des Mémoires de guerre du général De Gaulle : « Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France. » Idée indissociable d’une vocation, c’est-à-dire d’un rapport à l’universel. On retrouve là ce qui distingue la nation des tribus et des empires. Les tribus, les ethnies existent pour elles-mêmes, ne connaissant qu’elles-mêmes. Les empires sont, eux, des puissances et tendent à dominer toute l’humanité. Les nations, quant à elles, se pensent en fonction de l’universalité tout en sachant qu’elles sont limitées."

Demain je mettrai en ligne les réponses de Emmanuel Terray, anthropologue, directeur d’études à l’EHESS à des questions similaires, de Suzi Vieira.

Pour écouter une chanson de Johnny Clegg avec, ensuite un petit discours de Nelson Mandela , cliquez ici

Commentaires

Ces lignes sont extraites du numéro 12 de Philosophie magazine :

http://philomag.com/fiche-ancien-numero.php?id=12

Écrit par : Cyril Druesne | 18/09/2007

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