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27/05/2008

Jules Vernes

 Je vous propose un peu de lecture avec Jules Vernes

Si T. Artelett eût été Français, ses compatriotes n’auraient pas manqué de le nommer plaisamment Tartelett. Mais, comme ce nom lui convient, nous n’hésiterons pas à le désigner ainsi. D’ailleurs, si Tartelett n’était pas Français, il était digne de l’être. Dans son Itinéraire de Paris à Jérusalem, Chateaubriand parle d’un petit homme « poudré et frisé comme autrefois, habit vert pomme, veste de droguet, jabot et manchettes de mousseline, qui raclait un violon de poche, et faisait danser Madelon Friquet aux Iroquois."   ICI

 

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24/04/2008

Critique cinéma

"Précis de brutalité gratuite

Michael Haneke signe un remake de son film critique sur la violence au cinéma"

Funny Games USA

"En 1997, le cinéaste autrichien Michael Haneke faisait scandale au Festival de Cannes avec Funny Games, un film relatant le calvaire d’une famille de bourgeois aisés en vacances, humiliée et torturée sans mobile par deux jeunes gens. En réalisant, dix ans après, quasiment plan par plan, un remake américain de son propre film, Michael Haneke ne pouvait pas ne pas savoir que le temps passé entre les deux versions, au-delà des différences visibles à l’image (le changement des comédiens et le typage humain dont ils sont l’incarnation), accroîtrait l’entreprise de déconstruction de la violence filmée qu’était le film initial.

Funny Games et son remake sont d’abord des objets théoriques dont le principe consiste à prendre au piège un spectateur modelé à la fois par une idéologie et une habitude de la violence au cinéma. Haneke s’emploie à jouer sur tous les mécanismes perceptifs d’un spectateur moyen dont il déstabiliserait les réflexes, parfois contradictoires, d’identification et d’assouvissement cathartique.

Image d’une famille occidentale type (un couple avec un enfant), les victimes du film capitalisent à la fois toute l’empathie consécutive à leur calvaire et leur relative banalité mais aussi tout un ressentiment possible face à leur statut social apparent de privilégiés. Une telle entreprise repose sur le parti pris de casser, à intervalles réguliers, l’illusion du spectacle par des adresses et clins d’œil au spectateur, dont la présumée « complicité » est soudain bousculée ou prise à partie. Parfois c’est la conduite du récit lui-même qui s’ouvre vers des virtualités désirées puis contredites, coupant l’herbe sous le pied, sardoniquement, des attentes d’un spectateur transformé en cobaye volontaire.

Se repaître de la violence cinématographique, est-ce forcément se placer du côté des criminels, ici deux jeunes gens polis, aux motivations jamais énoncées ? En partant du principe que toute réception à la brutalité cinématographique est déterminée par la croyance en certains archétypes qui la rendrait acceptable (le besoin de rétribution, la recherche d’une satisfaction morale), Funny Games USA entend ainsi mettre à nu ces clichés. C’est comme si l’on entendait régulièrement le ricanement d’un manipulateur fier de son coup.

« Déglamouriser une actrice »

Il pourrait s’ensuivre, dès lors, un sentiment de colère face à ce qui paraît s’annoncer comme une manière de donner des leçons conjuguées à une forme de complaisance face à une brutalité que la tension du film (1 h 50 de malaise et de torture) peut favoriser. Ce serait ne pas admirer l’intelligence sarcastique de la mise en scène elle-même, faite souvent de longs plans-séquences, tout au sevice d’un objectif un peu démiurgique et non dénué d’humour.

Mais c’est dans l’écart avec la version de 1997 que Funny Games USA apparaît riche de potentialités critiques. Haneke ne s’est pas seulement contenté de « déglamouriser » une actrice hollywoodienne (Naomi Watts) alors qu’il avait paradoxalement érotisé, en la plongeant dans une situation de peur absolue, sa comédienne de la première version (Suzanne Lothar). Michael Haneke s’est mis dans la peau du héros de cette nouvelle de Borges qui décidait de réécrire, mot à mot, le Don Quichotte de Cervantès. La langue de l’écrivain devient ainsi une langue datée, appartenant à une histoire révolue.

Le cinéma d’horreur industriel a depuis un moment intégré lui-même toutes sortes de pratiques de déconstruction et a conceptualisé une peur cinématographique qu’il a rapprochée des angoisses de l’époque. La force du spectacle est ainsi telle que l’on peut parier que l’on trouvera dans quelques mois le DVD de Funny Games USA au rayon « film d’horreur » des grandes surfaces."

Jean-François Rauger, le Monde  23 avril (p. 23)

16:29 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (2)

12/04/2008

Autre dernier extrait du même article

« Présenté pour la première fois à un public national en juillet 2004, lorsqu’il présenta un discours devant la convention démocrate, celui qui était alors candidat au Sénat dans l’État de l’Illinois conquit les délégués (et les médias) en appelant, loin de toute idéologie précise, à croire en la communauté et en la citoyenneté. Son discours est devenu célèbre :

 

« Il n’y a pas une Amérique progressiste et une Amérique conservatrice - il y a les États-Unis d’Amérique. Il n’y a pas une Amérique noire et une Amérique blanche, une Amérique latina et une Amérique asiatique : il y a les Etats-Unis d’Amérique ( … ) Nous vénérons un Dieu tout-puissant dans les États bleus ( à majorité démocrate), et nous n’aimons pas que les agents fédéraux fouinent dans nos bibliothèques dans les États rouges (à majorité républicaine). Nous préparons les championnats de basket dans les États bleus et nous avons des amis gays dans les États rouges. Des patriotes se sont opposés à la guerre en Irak et des patriotes l’ont soutenue. Nous sommes un seul peuple, nous avons tous prêté serment d’allégeance au drapeau, nous défendons tous les Étas-Unis d’Amérique. »

 

Lors des ses meetings électoraux - que certains observateurs ont comparé à des offices religieux -, M. Obama indique systématiquement à ses partisans que tous les Américains, quels que soient leur race, leur couleur ou leur genre, peuvent connaître la prospérité. Son propre nom, nous explique-t-il, résume les bienfaits des Etats-Unis : « Mes parents m’ont donné un nom africain, Barak, qui veut dire « béni », en pensant que dans une Amérique tolérante le nom que l’on porte n’est pas un obstacle à la réussite. Ils ont imaginé que j’irais dans les meilleures écoles du pays, bien qu’ils ne fussent pas riches, car dans une Amérique généreuse vous n’avez pas besoin d’être riche pour réaliser votre potentiel. »

 

Le sénateur présente sa candidature comme post partisane et post raciale visant à rassembler tout le monde dans un consensus en faveur du « changement. » Même vague l’idée percute. Elle permet aux partisans du candidat de se fabriquer une image de M. Obama indépendamment du programme qu’il porte. Ce n’est pas que le prétendant démocrate évite de s’engager (il l’a montré à propos de l’Irak), mais plutôt que ses sympathisants négligent parfois ses prises de position, leur préférant la représentation d’ensemble qui leur est communiquée.

 

Dans son message, la convergence entre la forme et le contenu n'est nulle part plus apparente que dans le slogan « Oui, nous pouvons » (Yes, we can), lequel incarne les thèmes universalistes de l’intégration et de la tolérance dans un style question-réponse évocateur de la tradition participative de l’église afro-américaine. En somme, le candidat représente l’apothéose de l’universalisme démocrate que le parti affirme depuis un demi-siècle.

 

Au cours de la campagne, il a subi des attaques répétées - M. Clinton d’abord, puis le sénateur républicain John McCain l’ont accusé de se contenter «  uniquement de rhétorique », manquant de substance et de poids. On lui reproche une connaissance sommaire du fonctionnement de l’appareil d’État et l’absence de programme clair.

 

Ces griefs expriment une inquiétude légitime. Mais la politique est aussi une affaire de langage fort, évocateur, de « poésie » (pour reprendre cette épithète qui se voudrait disqualifiante apposée à M. Obama). Les mots, et la capacité de les prononcer, représentent l’art de la profession, car la politique est un art rhétorique. Les Américains ont écouté Ronald Reagan ; ils ont plutôt aimé ce qu’ils entendaient. On ne peut guère en dire autant de l’actuel président ou de son père.

 

De la même manière, M. Clinton se distingua de presque tous les autres candidats démocrates récents à la présidence (y compris son épouse) par sa maîtrise de l’art de la communication, sans laquelle l’homme ou la femme politique ne peuvent accomplir grand-chose. La sagesse populaire (dont la candidate Hillary Clinton se fait sans cesse l’écho) voudrait que, si l’on mobilise un électorat sur le mode de la poésie, on gouverne une nation sur celui de la prose. Mais à l’âge de la campagne électorale permanente, il importe de maîtriser en permanence les deux registres. Que les dirigeants américains considérés comme les plus grands soient ceux dont on se rappellent les paroles n’a rien d’accidentel. »

Extrait de l’article de John Gerring et Joshua Yesnowitz paru dans Le Monde diplomatique.

 

 

09:26 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (2)