15/10/2008
À Saint-Omer
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13/10/2008
Koniec
... "Depuis lors, mon existence est celle d’un oisif plein aux as et mon affable banquier me reçoit toujours en m’ouvrant grand ses bras, m’offrant de-ci de-là des placements juteux à ne surtout pas manquer. Comme je n’y entends goutte, je signe en silence des bas de pages rédigées comme en hébreu.
Et je bats la campagne, uniquement occupé à humer le vent des marais, à sentir la légèreté des bruines sur mon visage, à suivre le pas d’un chevreuil sur la boue d’un chemin de halage, à contempler le soleil qui plonge derrière les grands peupliers, aux heures calmes du soir, comme s’il y était un moment retenu prisonnier par de grands bras lancés vers le ciel et qui le supplieraient de rester encore un moment.
Mais dans mon sommeil, le moindre frémissement sur les contrevents disjoints que la pluie fait ruisseler, le moindre frottement sur les tuiles de mon toit où des chats sont en maraude, un halètement de la cheminée, un craquement assoupi du vieux bois dans l’escalier, le froissement d’un papillon de nuit pris au piège de mes rideaux, me font surgir du sommeil et interroger la nuit de mes fièvres maladives.
Le jour, un bruissement au bord des chemins que bordent des halliers, un gibier qui déboule à mes pieds et détale à travers les champs humides, un ragondin qui s’ébroue, un arbre qui gémit sous les caresses d’un souffle, m’arrachent un petit cri d’effroi et me font trébucher. Dans un café ou au restaurant, si un monsieur m’aborde, me sourit ou me demande du feu, dans la rue, si j’entends des pas qui emboîtent de trop près les miens, au supermarché si quelqu’un porte un instant sur moi son regard endormi, à la poste, à la boulangerie, chez le boucher, à la pharmacie, partout mon âme autant que mon cœur, comme des animaux blessés, cherchent à fuir et à se dissimuler.
Je suis au paradis des choses tangibles mais aux portes d’un enfer de solitude morale anxieuse jusqu'à la douleur, déprimé, qui, à n’en pas douter, je le sens bien à mes vertiges de plus en plus fréquents, à mes pertes de mémoire de plus en plus handicapantes, aux sanglots qui jaillissent à tout moment et comme sans raisons, aux quantités effroyables d’alcool que j’ingurgite chaque jour, finira par me tuer plus surement que les fusils de toutes les conspirations du monde."
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Au bord de l'A16
"C'est un petit cimetière, au détour d'un lacet, à l'écart du village de Coquelles. La vue sur l'entrée du tunnel sous la Manche est imprenable. Cinq migrants sont enterrés là. "Immigrant inconnu", lit-on sur un petit panneau de bois. Deux, sur les cinq, ont un nom. "Il est approximatif, précise M. Huleux, le fonctionnaire de la mairie de Coquelles. Nous recherchons les parents." La tâche est difficile. "Un seul a été réclamé, la procédure a commencé, puis nous n'avons plus eu de nouvelles : la famille afghane n'a sans doute pas réuni les fonds nécessaires."" Le Monde
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