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28/10/2019

Une journée riche en émotions ♣♣♣ L'extrait de La Maison Russie de John Le Carré ♣♣♣ Réflexion et Prière

J'arrive à Ault, je repère le café où boire mon chocolat chaud, je le commande gentiment et l'homme derrière le comptoir m'annonce que je suis dans un restaurant, une femme arrive de derrière le comptoir, le contourne, toujours un torchon à carreaux à la main. Elle rit et me dit qu'"au tabac", juste un peu plus loin, le décor sera mieux pour un chocolat chaud. Je ne me savais pas aussi rigolote.  "Au moins si j'ai pu vous faire rire..."

 

Je pense que c'était quelqu'un de jovial par nature. Naturellement joviale...  cela vous donne un coup de chaud au cœur, comme si la personne vous envoyait une vibration de bonheur. 

 

On avance dans la matinée, il est environ dix heures. Je fais le tour du joli Ault. Un besoin d'uriner m'oblige à regagner l'ancien casino où se déroule le salon du Livre. Dommage qu'on ne pense plus souvent aux toilettes publiques. Du coup, je ne peux pas voir l'église de l'intérieur, qui n'ouvre que le temps de la messe. Je rejoins Patrick. Il ne sent pas le lieu me dit-il. "Ce n'est pas un lieu pour nous." Cela n'englobe pas la cité, juste un lieu. Si c'est comme à Téteghem, ce ne sera pas marrant pour lui. Je reste donc à ses côtés et m'aperçois peu à peu que le métier de commercial est rude, surtout quand "ce n'est pas un lieu pour vous." D'aucuns sont contents, vendent à tirelarigot. Un homme qui est venu nous tenir une bavette durant une demi-heure, tient son carnet de chèques tout contre lui, et achète à droite à gauche. Il fera exception pour nous. Les gens de ce salon auront cette attitude presque tout le temps. Sauf trois personnes, bénies soient-elles. Donc une vente de trois livres. Etre écrivain c'est une belle aventure. Etre commercial, c'est rude !

Pourquoi riche en émotions la journée ? parce que j'ai fait le job de l'ange gardien pour Patrick. Il était fatigué et je l'ai tout le temps réconforté. 

 

Autre chose : au lieu de manger mon sandwich fromage de brebis/ cornichons habituel, j'ai ingurgité au banquet des invités du salon, une cuisse de canard, savoureuse "à tomber par terre". Ce sera la cuisse de canard de ma vie étant donné que j'essaie de manger le moins de viande possible. Mais là, je dois dire "qu'est-ce que c'était bon !" Arrosé d'un demi verre de vin rouge ! Hmmm ! 

 

♣♣♣

 

L'extrait :

 

Je reviens page 18, quand Niki n'a pas encore rencontré la femme Russe en robe bleue et col à dentelle.

 

"Au siège principal de ses clients près du périphérique ouest, Landau avait conseillé : "Mieux vaut nous réserver pour la foire du livre de Moscou en septembre. Les Russkofs aiment bien les livres, voyez-vous, Bernard, mais le marché audio leur fait peur, et ils ne sont pas encore prêts pour ça. Si on fonce sur la foire du livre, on fera un tabac. Si on fonce sur l'audio, on signe notre arrêt de mort."

 

Mais les clients de Landau étaient jeunes et riches et ne croyaient pas à la mort.

 

— Mon petit Niki, avait commencé Bernard, venant derrière lui et lui posant la main sur l'épaule, ce qui avait déplu à Landau. Dans le monde d'aujourd'hui il faut hisser le drapeau. On est patriotes, vous comprenez, Niki ? Comme vous. C'est pour ça que notre compagnie est multinationale. Aujourd'hui avec la glasnost, l'Union soviétique c'est le mont Everest du marché de l'enregistrement. Et vous allez nous emmenez au sommet, Niki, parce que sinon, on trouvera quelqu'un d'autre pour le faire, quelqu'un de plus jeune, hein, Niki ? Quelqu'un qui aura l'énergie et la classe.

 

L'énergie, Landau l'avait encore, mais la classe, lui-même était le premier à le reconnaître, peine perdue. Il aimait à se considérer comme un phénomène, un drôle de phénomène polonais, arriviste, bas du cul, et fier de l'être. Le bon vieux Niki, le petit gars culotté, le représentant spécialisé dans les pays de l'Est, capable, se vantait-il volontiers, de vendre des photos cochonnes à un couvent géorgien ou une lotion capillaire à une boule de billard roumaine. Landau, le petit athlète en chambre, qui portait des talonnettes pour donner à son corps slave la stature anglaise qu'il admirait tant, et des costumes voyants qui semblaient crier "Attention les yeux !". Quand ce vieux Nik prépare son stand, assurèrent ses collègues à nos enquêteurs non identifiables, on croirait entendre tinter la clochette d'un marchand des quatre-saisons polonais.

 

Et le petit Landau riait lui aussi de la bonne blague, il entrait dans le jeu. "Eh, les gars, je suis saoul comme un Polonais !" déclarait-il fièrement en commandant une autre tournée. Ce qui avait le don de les faire rire, et pas à ses dépens. Souvent, pour confirmer ses dires, il sortait prestement un peigne de sa poche-poitrine, se penchait devant un tableau ou une surface polie et, de ses deux mains, plaquait virilement en arrière ses cheveux trop noirs avant de partir à l'assaut d'une nouvelle conquête. "Et qui donc est cette ravissante personne que je vois là-bas dans le coin ?" demandait-il avec son accent infernal, mélange de polonais du ghetto et de cockney de l'East End. "Bonsoir, ma jolie ! Pourquoi elle se morfond  toute seule ce soir, la petite chérie ?" Une fois sur cinq il faisait une touche, ce qu'il jugeait un bon rendement, à condition que les tentatives soient fréquentes.

 

Mais ce soir-là, Landau ne pensait pas à faire une touche, ni même une tentative. Il songeait qu'une fois de plus il s'était donné bien du mal toute la semaine  pour une maigre pitance, ou, comme il me le dit d'une manière plus imagée, pour se faire avoir jusqu'au trognon. Maintenant chaque foire, qu'elle fût du livre, de l'audio, ou de n'importe quoi, le vidait un peu plus qu'il n'aimait à se l'avouer et lui donnait un peu moins en contrepartie, tout comme les femmes. Il avait hâte de reprendre l'avion pour Londres dès le lendemain. Et si cette nana russe en robe bleue s'obstinait à attirer son attention alors qu'il essayait de finir ses comptes et arborait déjà son sourire mondain avant de rejoindre la joyeuse mêlée, il allait très certainement lui dire quelque choses en russe qu'ils regretteraient à jamais tous les deux." 

 

Voilà. John le Carré : j'aime. Il est très vivant. Ne triche pas de manière perverse. Il navigue dans un monde de tricheurs, le métier d'espion oblige en effet à tricher du fait même qu'on utilise la ruse, qu'on prêche le faux pour savoir le vrai. Un métier dangereux pour l'âme car on "flirte" avec la trahison. Le but peut être noble cependant ou au contraire, mauvais. C'est un univers trouble.

 

Le personnage aimé de John Le Carré évite autant que faire se peut de blesser une femme, par exemple, tout en voulant s'accomplir au niveau sexuel. 

 

Les frustrations sexuelles pouvant engendrer bcq de violence, je trouve Niki plutôt sain pour ma part. Il fait une tentative. S'il échoue, il n'en veut pas à la femme qu'il a tenté de séduire le temps d'une nuit. Je le trouve plein de vie ce personnage, et doté d'une certaine élégance. L'élégance dans l'attitude est chose appréciable qui va avec bonheur de vivre, n'est-ce pas ? Une conscience de l'autre, un respect de sa différence.

 

♣♣♣

 

Vu cette belle réflexion ci-dessous. Exceptionnellement, je mets la page du site en entier :

 

Méditons avec bienheureux Pierre Claverie

 

 

Lors de son procès de canonisation, le cocher de la voiture qui conduisait tous les jours Jean Bosco de chez lui à l’œuvre, a été convoqué. Ce brave homme a dit : « Pour lui, j’existais. » Pour moi, c’est le miracle le plus extraordinaire.

 

Jean Bosco était vraiment un saint parce que les gens qui croisaient sa route pouvaient dire : « Pour lui, j’existais. » Là est la sainteté. Ce petit qui était là, le cocher du fiacre, voyait des dizaines de personnes monter dans sa voiture sans le remarquer plus qu’une porte, un pot de fleurs ou comme nos frères ou nos sœurs. 

 

Si un jour, tous ceux que nous avons croisés dans notre vie pouvaient dire : pour lui, pour elle, j’existais ! Voilà le vrai miracle. Je ne savais pas mon nom. 

 

Mémoires d’un religieux anonyme, Cerf, 2006, p. 21 et 22

 

 

 

Pour aller plus loin

 

 

Que notre regard fasse exister ceux que nous croisons, leur révèle leur dignité, leur prix, cela n’est pas naturel. C’est la grâce, c’est-à-dire ce secours, cette motion intérieure, de l’Esprit Saint qui peut faire poser ces actes dans l’ordinaire des jours. Comme nous avons besoin d’appeler à l’aide l’Esprit ! L’appeler, non parce qu’il serait loin, absent, il est dans notre cœur, mais parce que, en l’appelant, nous nous rendons capables, nous devenons capacité à le recevoir. Il ne suffit pas d’un émetteur, il faut un récepteur ajusté.  

 

 

 

Résolution

 

Rendre service avec le sourire. 

 

 

Intention de prière

 

Pour les pays où la foi catholique est interdite.

 

 

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11:11 Publié dans Note, prière | Lien permanent | Commentaires (0)

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