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29/06/2017

Extrait de "Les royaumes du Nord" de Philip Pullman

 

Lyra aurait voulu en savoir beaucoup plus sur les sorcières ; hélas, les hommes parlèrent ensuite des problèmes de carburant et de provisions et, finalement, elle eut très vite envie de découvrir le reste du bateau. Marchant sur le pont en direction de la proue, elle fit bientôt la connaissance d'un matelot, en lui lançant les pépins de la pomme qu'elle avait mangée au petit déjeuner et qu'elle avait gardés. C'était un robuste gaillard au tempérament placide, et après avoir échangé quelques jurons, ils devinrent amis. Il s'appelait Jerry. Sur  ses conseils, Lyra découvrit que le fait de s'occuper empêchait d'avoir le mal de mer, et que même une tâche ingrate comme nettoyer le pont pouvait être agréable, si on l'accomplissait dans l'esprit d'un marin. Cette idée l'enchanta et, dès lors, elle plia les couvertures sur sa couchette comme l'aurait fait un marin, elle rangea ses affaires dans le placard comme un marin, et se mit à employer des termes de marine.

 

Après deux jours passés en mer, Lyra décréta que cette vie était faite pour elle. Devenue maître du bateau, de la salle des machines jusqu'au pont, elle connut rapidement tous les membres de l'équipage par leur prénom. Le capitaine Rokeby l'autorisa à adresser un signal à une frégate hollandaise en actionnant la poignée du sifflet ; le cuistot accepta son aide pour préparer le plumpudding, et seule l'intervention sévère de John Faa l'empêcha de grimper au mât de misaine pour scruter l'horizon du haut du nid-de-pie.

 

Ils voguaient droit vers le nord, et chaque jour, il faisait un peu plus froid. On fouilla dans les réserves du bateau pour trouver un ciré que l'on pourrait couper à la taille de Lyra, et Jerry lui enseigna l'art de la couture, une activité qu'elle apprit de bon cœur, après l'avoir pourtant rejetée avec mépris du temps de Jordan College, quand elle refusait d'écouter les instructions de Mme Lonsdale. Ensemble, ils confectionnèrent pour l'aléthiomètre un petit sac étanche qu'elle pourrait porter à la taille. Au cas où elle tomberait à l'eau dit-elle. Le sac accroché à la ceinture, vêtue de son ciré et coiffée de son chapeau imperméable, elle agrippait le garde-fou, face à l'écume cinglante qui passait par-dessus la proue et se répandait sur le pont. Parfois, elle souffrait encore un peu du mal de mer, surtout quand le vent se levait et que le bateau piquait du nez en transperçant les immenses vagues gris-vert. Dans ces moments-là, c'était à Pantalaimon qu'il incombait de la distraire en frôlant la surface de l'eau sous la forme d'un pétrel, car Lyra sentait la joie infinie qu'il éprouvait au milieu des bourrasques de vent et d'eau salée, et elle en oubliait ses nausées. De temps à autre, il essayait même de devenir poisson, et une fois, il se joignit à un banc de dauphins, à leur vif étonnement et pour leur plus grand plaisir. Frissonnante sur le gaillard d'avant, Lyra riait joyeusement de voir son Pantalaimon adoré, agile et puissant, jaillir hors de l'eau en même temps qu'une demi-douzaine d'autres formes grises insaisissables. Pourtant son plaisir se teintait de douleur et de peur, car elle s'interrogeait :  et s'il cessait de l'aimer pour devenir dauphin ?

 

Son ami  le matelot se trouvait près d'elle à ce moment-là, occupé à tendre une bâche au-dessus de l'écoutille avant, et il s'interrompit pour regarder le daemon  de la fillette batifoler avec les dauphins. Son propre daemon, une mouette, perchée sur le cabestan, avait enfoui sa tête sous son aile. Le marin savait ce que ressentait Lyra.

 

Les Royaumes du Nord

À la croisée des mondes, I

 

pages 226 à 228

 

C'est un livre jeunesse que je lis avec plaisir. Je l'avais acheté il y a des années et j'ai pris le temps de le lire ces jours-ci seulement. Lyra a des parents peu commodes, et se bat pour sauver un ami, garçon de cuisine de "son état",  kidnappé par sa mère à elle,  des griffes de celle-ci qui l'a probablement enlevé pour l'utiliser comme cobaye à tuer. 

 

   

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