19/10/2014
Les Compagnons du Trésor
J'ai terminé la lecture des Compagnons du Trésor de Féval. Je dois dire que j'en ai eu pour mon argent selon l'expression consacrée car je n'ai pas payé le livre. Le colonel Bozzo, chef de l'association criminelle des Habits Noirs est un tragi-comique décidant de la vie et de la mort d'individus qu'il embauche et débarque à son gré, quand "rien ne va plus" comme il l'entend, lorsqu'il pressent un déraillement possible de l'un ou l'autre. Toujours sur le mode de la farce, les tueurs éclatant facilement de rire derrière les fourrés, à l'affût de celui qu'ils ont ordre de "seriner", le colonel Bozzo commandite les meurtres et devient une sorte de méchant Donald qui élimine quand cela lui chante, un pion, un simple pion. Il crée ainsi un cercle vicieux et tout se termine sur le ton farce et attrape macabre. L'enfer en somme, chacun des membres de l'association se défiant de l'autre constamment ; et au sein de cet enfer : Echalot et Madame Canada passent entre les gouttes. Avec le couple de jeunes fiancés dont chacun est extraordinairement beau et pur, nous avons le couple Echalot-Léocadie Canada, tout de guingois quant à lui, par rapport au parcours de l'un et l'autre et à leur physique ingrat, mais qui recèle aussi cette capacité d'aimer, laquelle finit par faire défaut à presque tous les autres personnages de l'histoire, obnubilés par le trésor qui les ronge de l'intérieur. Féval croit vraiment, il le dit, que décidément non, l'argent ne fait pas le bonheur, c'est quasi une malédiction où l'on voit par exemple un père qui adorait sa fille et son fils adoptif, les oublier peu à peu pour consacrer toute son énergie à son "idée fixe" : le trésor qui le consume. Ne pas croire en l'argent c'est sincère chez Féval et c'est ce qui me le rend aimable au final ; pour lui, si l'on dépasse un certain cap au niveau de la richesse personnelle, de l'avoir, les choses se termineront mal. L'or est une malédiction. Qui n'a pas entendu parler par ailleurs de l'or noir, le pétrole, comme en étant une, de la part des gens habitant des pays qui en ont beaucoup, en raison des guerres qui s'y déroulent constamment. La soif de n'importe quel trésor matériel est une calamité dans le fait de vouloir au final le posséder sans partage. Et Féval de le démontrer. Son colonel est un humoriste qui rappelle les clowns monstres dont on parle ces temps-ci, l'humour sert de soupape, afin que ses collaborateurs, un peu déstabilisés, ne sachent pas vraiment à quoi s'en tenir, et prennent patience quant à leur envie de lui tordre le cou. Féval pour autant n'est pas un misanthrope , il y a des êtres innocents... dont des "êtres-chiens ", du genre Terre-Neuves, au grand cœur, (dont font partie madame Canada et Echalot), et qui, du même coup semblent "de grands enfants" quelque peu attardés. C'est là que réside l'ambiguïté de Féval que je considère comme un romancier néanmoins très enrichissant.
Par contre, avec tous ces bruits de tronçonneuses que l'on entend sur la toile à l'occasion d'Halloween... Bruits horribles, je pense aux arbres avec plus, je dirais, de conscience, en ce qu'ils fournissent le papier de nos chers bouquins. Sentent-ils la tronçonneuse s'approcher d'eux et les couper de leurs racines, le tout dans cet horrible tintamarre ? D'un point de vue strictement écologique, il faudrait en couper de moins en moins et penser à un autre mode de lecture, outre celui des tablettes. Les donneurs de voix par exemple : cela permettrait de lire par les voix d'autrui, lire "par l'oralité" pour économiser les arbres. Oublier les tronçonneuses : une bonne chose, c'est le prix d'une poésie vivante. Choisir ses trésors et non être désigné par l'un d'eux et se laisser dévorer par lui : choisir les arbres par exemple, en autres, un trésor pour la respiration.
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