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12/09/2013

Le temps

La vie de Gina s’était longtemps déroulée  comme un chemin assez cahoteux, elle avait laissé filer le temps surtout lorsqu’il voulait lui mettre le grappin dessus ; de grosses horloges s’affichaient dans tous les lieux où menaçait la stagnation, l’art consistait à le laisser filer. Maintenant le temps pour elle s’écoulait trop vite, devenait précieux, se découpait en instants de vie chipés à la grande contingence. Pour l’heure, elle marchait sur le bord de la route et regardait  se dandiner sur le trottoir une grosse petite fille qui attendait sa mère, occupée à sa voiture, pour rentrer chez elle. Depuis combien d’années déjà Gina habitait-elle dans ce quartier ? Quinze ans ! la gamine en avait moins, onze ans tout au plus.

La vieille Gina avait appris le poids des choses, du temps, du corps endolori et tenta de lui manifester sa solidarité par un sourire. La mère regarda à son tour la piétonne qui passait maintenant devant elle, plissa les lèvres en signe de désapprobation et demanda à sa fille de rentrer. Celle-ci s’exécuta prestement.  Plus loin Gina vit un groupe d’adolescents en train de palabrer devant un garage grand ouvert, des vélos couchés devant eux. Ils parlaient fort pour se donner un peu d’assurance, doutaient encore de certaines choses apparemment, ils étaient abordables au fond et Gina décida de ne pas les éviter comme elle le faisait d’ordinaire ; elle les considéra quelques secondes avant de les interpeler

 

— Dites-moi les enfants ça vous dirait de regonfler les pneus de mon vélo pour dix euros ?

Un deal acceptable compte tenu de l'économie de temps que cela représentait pour elle…

L’aîné acquiesça, son frère se précipita pour l’aider dès que Gina apporta le vélo

— Dites madame je voulais vous demander votre mari est toujours en costume, qu’est-ce qu’il fait, c’est un banquier ?

— juste fonctionnaire, c’est pour ça.

— Ah bon …

Le garçon eut l’air de trouver suffisamment claire cette réponse, et acceptable. Gina  trouva en y repensant qu’elle aurait pu répondre que ce mari ne portait jamais que des habits de tergal plus seyants à son âge …

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